L'immense chanteuse Nina Simone possède une voix hors du commun qui lui permet de tout chanter. Il est d'ailleurs impossible de la cantonner dans un genre musical. D'abord plutôt timorée à l'endroit de la lutte pour les droits civiques, elle s'implique de plus en plus dans ce combat comme l'attestent ses nombreux titres engagés ou en tout cas concernés (Mississippi goddam, Young gifted and black, Four women...). Progressivement, elle infléchit sensiblement ses positions. Si elle apprécie le dr King, elle trouve sa démarche naïve, inefficace, trop lente tout au moins. Elle lui préfère les meneurs du Black Power, Stokely Carmichaël ou Malcom X.
Nina Simone chante ici un poème de Langston Hughes (1902-1967), grand poète et militant afro-américain. Elle l'enregistre en 1966 pour son disque "The blues". Le poète explique ici l'usage qui est fait des impôts alors que les Etats-Unis s'engagent toujours plus dans la guerre du Vietnam. Partageant la vision de Hughes, Nina Simone joint le geste au chant puisqu'elle décide d'arrêter de payer ces impôts qui ne servent qu'à financer l'effort de guerre américain au Vietnam.
Dix ans plus tard, le fisc l'attaque en justice et elle perd sa maison, ce qui la pousse à émigrer vers la France, où elle finira sa vie (en 2003).
La guerre du Vietnam est le premier conflit au cours duquel les Noirs combattent dans les mêmes unités que les Blancs. De nombreuses voix s'élèvent donc contre ce conflit meurtrier. Mohammed Ali qui refuse de servir au Vietnam en 1967, devient objecteur de conscience et lance: " ils veulent que j'aille au Vietnam pour tuer des Vietcongs, alors qu'eux, ne m'ont jamais lynché, jamais traité de nègre, n'ont jamais assassiné mes leaders". Malcolm X, quant à lui, s'étonne de voir " l’homme jaune tué par l’homme noir se battant pour l’homme blanc".
Comme beaucoup d'Afro-américains, Hughes voit aussi dans cet enlisement au Vietnam, un bon moyen pour faire lanterner les Noirs en pleine lutte pour les droits civiques. M. Luther King, qui soutenait initialement la politique de Johnson, dénonce bientôt sa stratégie belliqueuse et souligne à quel point les sommes engagées pour tuer seraient utiles pour venir en aide aux populations misérables des ghettos.
Surtout, Hughes souligne l'hypocrisie des autorités américaines qui considèrent que les Noirs américains peuvent se faire trouer la peau, comme n'importe quel autre Américain, mais continuent de tolérer les discriminations raciales à l'intérieur du pays.
L'expression backlash signifie retour de bâton
"Backlash blues" Nina Simone (Langston Hughes).
Mr. Backlash, Mr. Backlash
Just who do think I am
You raise my taxes, freeze my wages
And send my son to Vietnam
You give me second class houses
And second class schools
Do you think that alla colored folks
Are just second class fools
Mr. Backlash, I'm gonna leave you
With the backlash blues
When I try to find a job
To earn a little cash
All you got to offer
Is your mean old white backlash
But the world is big
Big and bright and round
And it's full of folks like me
Who are black, yellow, beige and brown
Mr. Backlash, I'm gonna leave you
With the backlash blues
Mr. Backlash, Mr. Backlash
Just what do you think I got to lose
I'm gonna leave you
With the backlash blues
You're the one will have the blues
Not me, just wait and see
.................
Mr Backlash, Mr Backlash
Pour qui me prenez-vous?
Vous augmentez mes impôts, gelez mon salaire
et envoyez mon fils au Vietnam
Vous me donnez des maisons de seconde classe
et des écoles de seconde classe
Pensez-vous que tous les gens de couleur
soient seulement des fous de seconde classe
Mr Backlash, je vous quitte
avec votre backlash blues
Quand j'essaye de trouver un travail
de gagner un pau d'argent
Tout ce que vous avez à m'offrir
est votre méchant retour de bâton
Mais le terre est vaste, ensoleillée et ronde
peuplée de tas de gens comme moi
qui sont noir, jaune, beige et bruns
Mr Backlash, je vous quitte
avec votre backlash blues
Mr backblash, mr backlash
je n'ai rien à perdre
je vais vous laisser
avec votre backlash blues
C'est vous qui aurez le blues,
pas moi, attendez, vous verrez
Des rubriques très intéressantes, un blog attrayant! bravo pour tout ça! Je te mets direct dans mes liens sur mon blog:
RépondreSupprimerhttp://my.opera.com/MANU.../blog/
Intéressant mode de protestation, la grève des impôts. A mille lieues des revendications de Poujade qui a également utilisé cette méthode.
RépondreSupprimerTout cela met en évidence une des principales difficultés de Johnson : concilier les dépenses indispensables qu'il a lancées dans le domaine social et l'engagement croissant dans la Guerre du Vietnam. Il auraît sans doute fallu choisir...
Merci Julien