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mercredi 25 février 2009

143. Black Uhuru:"I love king Sélassié".

Le président français Georges Pompidou et Haile Selassie en janvier 1973, à Addis-Ababa.

Fils du ras Makkonen et neveu de Ménélik II, Hailé Sélassié appartient à une famille qui prétend descendre de Ménélik Ier, fils du roi Salomon et de la reine de Saba. Désigné comme régent et héritier du trône d'Ethiopie en 1917 par sa tante, l'impératrice Zaoditou, il parvient à faire rentrer son Etat à la SDN en 1923. Il modernise son pays, abolissant par exemple l'esclavage en 1924. Devenu empereur en 1930, il s'aligne sur les démocraties occidentales; mais, malgré ses protestations à la tribune de la SDN, il ne peut résister à l'offensive de l'Italie fasciste en 1936. Réfugié à Londres, il ne retrouve son pouvoir qu'après la fuite des Italiens devant les forces britanniques, en 1941.

En 1955, Hailé Sélassié préside à la mise en place d'une nouvelle constitution instituant un Parlement élu au suffrage universel. Dans les faits, la modernisation reste très limitée. Monarque de droit divin, Sélassié concentre tous les pouvoirs et s'appuie sur l'Eglise éthiopienne qui dispose d'un monopole cultuel absolu, au grand mécontentement des communautés musulmanes. Dans le même temps, les difficultés sociales restent très préoccupantes. Par exemple, au début des années 1970, le pays compte 95% d'analphabètes. Enfin, les institutions ne permettent pas la démocratisation véritable du régime. La censure sévit avec virulence et la police détient des pouvoirs arbitraires.

Hailé Sélassié et Winston Churchill en 1954.

Dans ces conditions, des oppositions multiples voient le jour.
- Les officiers subalternes de l'armée, mal payés, s'agitent.
- Depuis 1960, l'Ethiopie a annexé l'Erythrée, au nord de son territoire, déclenchant une résistance armée du Front Populaire de Libération de l'Erythrée (FPLE).
- Au sud, la Somalie convoite la province éthiopienne de l'Ogaden.

- Les étudiants et les intellectuels se montrent de plus en plus critiques à l'égard d'un pouvoir incapable de répondre à leurs aspirations libérales.
- Enfin, le pouvoir s'avère incapable de porter secours aux victimes de la terrible famine qui s'abat sur les provinces du centre et du nord-ouest, en 1973.


L'agitation prend une ampleur exceptionnelle à partir de 1974, tant chez les étudiants à Addis-Abéba que dans les garnisons. Le 12 septembre 1974, un Comité de coordination des forces armées (le Derg, "comité" en amharique) dépose l'empereur après avoir phagocyté toutes les institutions. Hailé Sélassié mourra l'année suivante alors qu'il était emprisonné, sans doute assassiné sur ordre de Mengistu, le nouvel homme fort de l'Ethiopie (il restera au pouvoir jusqu'en 1991 avant de s'enfuir pour le Zimbabwe de Mugabe. Il a été condamné par contumace à la réclusion à perpétuité pour génocide puis condamné à mort en mai 2008).

Raul et Fidel Castro en compagnie du dictateur Mengistu.

Dans ces conditions, comment expliquer l'aura du Ras Tafari et la fascination qu'il parvint à susciter, chez les rastas, mais aussi sur la scène internationale? D'abord, Hailé Sélassié maîtrise son image à la perfection. Surtout, il ne ménage jamais sa peine lorsqu'il s'agit de voyager pour aller à la rencontre des grands leaders mondiaux. Pour illustrer cette diplomatie active, rappelons qu'il fut le premier souverain africain à entrer à la SDN. Après la seconde guerre mondiale, il utilisera aussi fréquemment la tribune de l'ONU pour justifier ses actions. Surtout, l'empereur joue un rôle important dans les affaires africaines. Ainsi, en 1963, c'est à son initiative qu'est fondée l'Organisation de l'unité africaine (OUA), dont le siège est d'ailleurs fixé à Addis-Abeba.

Comme nous l'avons vu, à partir des années 1930, Haile Selassie devint un véritable Dieu vivant pour les adeptes du rastafarisme (lire ici l'article consacré au Rastafari, Dieu des rastas). Le reggae étant le vecteur musical de ce courant religieux, on ne sera guère surpris du nombre d'odes à Jah. Mieux, c'est même pour les adeptes du reggae roots le seul thème digne d'intérêt. Ici, le groupe Black Uruhu chante les louanges du négus éthiopien. Le morceau très puissant est tiré de l'album Love crisis, enregistré en 1977, sous la houlette du très grand producteur Prince Jammy.



- Enfin, ultime hommage de Marley à Selassie, le vibrant Jah Live, qu'il compose quelques mois après le décès de l'ancien empereur. Pour Marley, comme pour tous les rastas, Selassie reste bien vivant:


* Liens:

- L'Ethiopie sur le blog:
Gainsbourg:"Negusa nagast".
Bob Marley: "War".

- L'ex-dictateur éthiopien Mengistu reconnu coupable de génocide sur le Monde.fr.
- Le Courrier internationa.com: "Un dictateur peut en cacher un autre".

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