L'installation progressive et difficile de la IIIème République s'accompagne de très nombreuses critiques. Aussi, de 1870 à 1914, le régime traverse et surmonte de très graves crises politiques dont tentent de tirer parti ses adversaires.
Parmi les principaux contempteurs de la République se trouve l’Action française (AF). Ce mouvement est fondé en pleine Affaire Dreyfus (1898) par Maurice Pujo et Henri Vaugeois, deux jeunes patriotes antidreyfusards. La grande figure du mouvement, Charles Maurras, les convainc rapidement de la nécessité d'une restauration monarchique.
L’Action française, la revue du mouvement créée en juillet 1899, se transforme en quotidien à partir de mars 1908 et contribue à diffuser le « nationalisme intégral » théorisé par Maurras. Ce dernier puise aux sources de la contre-révolution royaliste et fait de l'AF un parti de combat. Profondément antimoderne, nostalgique d'un âge d'or fondé sur le respect des rites et traditions d'une société organique détruite par la Révolution française, l'AF fait du catholicisme le garant de l'ordre, de l'autorité et des hiérarchies.
Affiche reproduite dans l’Action française, 1ère année, n°3, 23 mars 1908.
A longueur d'articles, Maurras fait part de sa détestation du libéralisme et de l'individualisme. Il y fustige la démocratie libérale, incarnation de la "décadence" française, ainsi que le parlementarisme, synonyme de vil bavardage et de corruption.
L'extrait ci-dessus -une affiche de l'Action française reproduite dans le n°3 du quotidien et dont sont tirés les extraits cités dans ce post- dresse les grandes lignes du programme de l'organisation. Il y apparait très clairement que l'objectif principal est de restaurer la monarchie.
Afin d'y parvenir, il faut se débarrasser des ennemis de la France qui, pour les hommes de l'AF, ont conduit la Révolution et constitue autant de corps étrangers à la tradition française, ces "quatre Etats confédérés" qui se coalisent pour entraîner le pays sur la voie du déclin:
1. Les Juifs sont, pour les hommes de l’Action française, les ennemis à combattre, et abattre, en priorité. Alors même que l’Affaire Dreyfus est terminée - le capitaine a été réhabilité en 1906- sa culpabilité reste évidente pour les royalistes antidreyfusards qui puisent aux diverses composantes de l'antisémitisme. (1)
2. Les « francs-maçons qui n’ont qu’une haine : l’Eglise, qu’un amour, les sinécures et le trésor public (...)", seraient, d'après les membres de l'AF, en lien avec les juifs, les instigateurs d'un vaste complot, tirant les ficelles des actions publiques.
Alors fervents soutiens de la République radicale, les francs maçons fournissent nombre de ministres. Très anticléricaux, ils inspirent et soutiennent les mesures prises dans les années précédentes, en particulier la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat de 1905. Or, pour l'AF, les idées laïques sapent les fondements de la société.
Parmi les principaux contempteurs de la République se trouve l’Action française (AF). Ce mouvement est fondé en pleine Affaire Dreyfus (1898) par Maurice Pujo et Henri Vaugeois, deux jeunes patriotes antidreyfusards. La grande figure du mouvement, Charles Maurras, les convainc rapidement de la nécessité d'une restauration monarchique.
L’Action française, la revue du mouvement créée en juillet 1899, se transforme en quotidien à partir de mars 1908 et contribue à diffuser le « nationalisme intégral » théorisé par Maurras. Ce dernier puise aux sources de la contre-révolution royaliste et fait de l'AF un parti de combat. Profondément antimoderne, nostalgique d'un âge d'or fondé sur le respect des rites et traditions d'une société organique détruite par la Révolution française, l'AF fait du catholicisme le garant de l'ordre, de l'autorité et des hiérarchies.
Affiche reproduite dans l’Action française, 1ère année, n°3, 23 mars 1908.
A longueur d'articles, Maurras fait part de sa détestation du libéralisme et de l'individualisme. Il y fustige la démocratie libérale, incarnation de la "décadence" française, ainsi que le parlementarisme, synonyme de vil bavardage et de corruption.
L'extrait ci-dessus -une affiche de l'Action française reproduite dans le n°3 du quotidien et dont sont tirés les extraits cités dans ce post- dresse les grandes lignes du programme de l'organisation. Il y apparait très clairement que l'objectif principal est de restaurer la monarchie.
Afin d'y parvenir, il faut se débarrasser des ennemis de la France qui, pour les hommes de l'AF, ont conduit la Révolution et constitue autant de corps étrangers à la tradition française, ces "quatre Etats confédérés" qui se coalisent pour entraîner le pays sur la voie du déclin:
1. Les Juifs sont, pour les hommes de l’Action française, les ennemis à combattre, et abattre, en priorité. Alors même que l’Affaire Dreyfus est terminée - le capitaine a été réhabilité en 1906- sa culpabilité reste évidente pour les royalistes antidreyfusards qui puisent aux diverses composantes de l'antisémitisme. (1)
2. Les « francs-maçons qui n’ont qu’une haine : l’Eglise, qu’un amour, les sinécures et le trésor public (...)", seraient, d'après les membres de l'AF, en lien avec les juifs, les instigateurs d'un vaste complot, tirant les ficelles des actions publiques.
Alors fervents soutiens de la République radicale, les francs maçons fournissent nombre de ministres. Très anticléricaux, ils inspirent et soutiennent les mesures prises dans les années précédentes, en particulier la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat de 1905. Or, pour l'AF, les idées laïques sapent les fondements de la société.
3. Les « pédagogues protestants » (2) sont une des autres cibles favorites de la jeune Action française. Persécutés sous les rois, les
protestants ont été d'une manière générale
de fervents républicains. Ainsi, de nombreux hommes politiques de cette confession (Jules Ferry) occupent des fonctions dirigeantes dans les premiers temps de la République, au grand des partisans du retour de la religion catholique en tant que religion d’Etat, que sont les partisans de l'AF. Ces derniers accusent en outre les protestants d'avoir instillé un esprit critique contribuant à saper l'unité du corps social.
Caricature antisémite d'A. Lemot parue dans Le Pèlerin en 1909. Les députés et sénateurs ne sont que des pantins animés par des marionnettistes juif et franc-maçon.
4. S'appuyant sur le déterminisme racial et biologique théorisé par Jules Soury et Vacher de Lapouge, Maurras et sa clique, injurient les «étrangers plus ou moins naturalisés ou métèques».
Leur xénophobie est attisée par l'arrivée en nombre d'immigrants, surtout Belges, Italiens, Polonais, Juifs d’Europe centrale, pour compenser le faible taux d’actifs français (la natalité est alors en berne).
Les propagandistes de l'AF dénoncent "l'invasion" des métèques, accusés de voler le travail des Français et de dénaturer l'identité nationale par leurs mœurs singulières. Pour ces hommes, les étrangers « accaparent le sol de la France, (...) disputent aux travailleurs de sang français leur juste salaire (...). »
Bref, ces "quatre Etats confédérés" servent de coupables idéal et fournissent une clef d'explication pratique aux difficultés de l'heure. L'ennemi public varie d'ailleurs selon l'époque. Ainsi, le complot judéo-maçonnique cède le pas devant le complot judéo-communiste dans l'entre-deux-guerres.
Faisant fi de la complexité des phénomènes, les tenants du "nationalisme intégral" attribuent la "décadence" nationale à cette anti-France, dont il suffirait de se débarrasser pour résoudre les difficultés (principe du y-a-qu'à/ faut-qu'on).
Se dispensant d'analyses sérieuses, les pamphlétaires de l'AF et leurs épigones, usent de raccourcis et slogans démagogiques efficaces. (3)
Le théoricien Maurras a besoin d'hommes de mains. Aussi l'association d'étudiants monarchistes, connus sous le nom de "Camelots du roi", est fondée en 1908 par Maxime Real del Sarte. Les Camelots deviennent les troupes de chocs de l'AF, prompts à s'imposer lors de batailles rangées avec les organisations de gauche. Or, quoi de mieux pour galvaniser les troupes que d'entonner des chansons de combat?
Aussi, les Camelots se dotent d'un important répertoire musical, des chants de haine à entonner lors des descentes dans le quartier latin.
Dans la droite ligne des idées maurassiennes, la chanson interprétée ici par Yvonneck, voue aux gémonies les tenants de la démocratie: "youpins", francs-maçons, étrangers. Les députés, ("les coquins de la parlementerie") sont cloués au pilori, Briand, Jaurès et Fallières, promis à une triste fin, identique à celle du régime.
Après avoir estourbi la "gueuse", cette République abhorrée et importée ("A bas la Marianne / la fille à Bismark"), les Camelots sont invités à restaurer le régime qui a fait la France: la monarchie et ses valeurs "authentiques", partagées par tous les "vrais Français" (sic).
La violence du propos peut surprendre, mais elle démontre avant tout à quel point la liberté d'expression est alors considérée comme une valeur à respecter coûte que coûte, quitte à ce que les pourfendeurs du régime ne s'en servent. Au fond, les paroles de cette chanson rappellent la violence verbale de Maurras. Imprécateur en chef, il ira jusqu'à réclamer l'exécution de Léon Blum dans un article d'une rare abjection. (4)
------------------
Notes:
1. - L'Action française fustige les "juifs voleurs" et leur prétendue cupidité. Cet antisémitisme économique remonte au au Moyen Age, lorsque les Juifs se spécialisent dans les métiers de la finance en Europe occidentale, métiers alors interdits aux catholiques. Par un raccourcis saisissant, les Juifs sont alors accusés de ne s'intéresser qu'à l'argent. Certains socialistes font aussi des Juifs les fourriers du capitalisme.
- L'action française les accuse en outre d'être les "corrupteurs du peuple", et d'être à l'origine des affaires politico-financières qui fragilisent la République à l'instar du scandale de Panama, en 1892.
- En réaction à la laïcisation engagée par la République, les ultra-catholiques de l'AF réactivent l'antijudaïsme théologique de l'Eglise médiévale et considèrent les Juifs comme les « persécuteurs de la religion catholique »(le peuple déicide).
- La dénonciation du "complot juif " s'impose comme un thème récurrent censé expliquer tous les troubles politiques et sociaux qui affectent le régime.
- Le développement du concept pseudo-scientifique de la race à la fin du XIXème siècle fait du Juif un être inférieur, un apatride, «traître » en puissance, à l'instar du capitaine Dreyfus qui espionnerait pour le compte de l’Allemagne.
2. L’allusion se réfère aux lois scolaires de 1881 par lesquelles l’école est devenue gratuite, laïque et obligatoire pour les garçons et les filles jusqu’à treize ans. Cela heurte profondément l’Action française pour laquelle seules les élites sociales méritent d’être instruites, la masse ne devant pas accéder au savoir afin être mieux manipulée. D’autre part, elle connaît les arrière-pensées des Républicains : les nouvelles générations, en échappant à l’analphabétisme, seront gagnées aux valeurs nouvelles par les instituteurs, infatigables militants de la République.
3. Ralliée à l'Union sacrée lors de la grande guerre, l'Action française connaît son apogée après le confit et séduit de nombreux intellectuels qui se rapprochent de l'organisation (Bernanos, Maritain). La condamnation pontificale de 1926 et la mise à l'Index du quotidien portent un coup sévère à l'AF qui connaît néanmoins un regain de vigueur à la faveur des émeutes antiparlementaires du début de l'année 1934. Mais l'incapacité à profiter de la crise du 6 février 1934 et le départ de la jeune garde du mouvement, attirée par le fascisme (Rebatet, Brasillach) participent à la perte de son influence à la veille de la deuxième guerre mondiale. Favorable à Vichy, Maurras multiplie les attaques contre la Résistance et les Juifs, ce qui entraîne sa condamnation pour trahison par la cour de justice du Rhône (il sera gracié en 1952).
Si après guerre, l'AF n'existe plus en tant que mouvement politique structuré, son influence reste grande auprès d'une partie des intellectuels de droite (Pierre Boutang, Philippe Ariès, Roger Nimier).
4. Le 9 avril 1935, Charles Maurras écrit à propos de Léon Blum dans L'Action française: « Ce Juif allemand naturalisé, ou fils de naturalisé [...] n'est pas à traiter comme une personne naturelle. C'est un monstre de la République démocratique. [...] Détritus humain, à traiter comme tel [...] . L'heure est assez tragique pour comporter la réunion d'une cour martiale qui ne saurait fléchir. [Un député] demande la peine de mort contre les espions. Est-elle imméritée des traîtres ? Vous me direz qu'un traître doit être de notre pays : M. Blum en est-il ? Il suffit qu'il ait usurpé notre nationalité pour la décomposer et la démembrer. Cet acte de volonté, pire qu'un acte de naissance, aggrave son cas. C'est un homme à fusiller, mais dans le dos. »
Il récidive le 15 mai 1935 contre le leader de la SFIO: " C'est en tant que Juif qu'il faut voir, concevoir, entendre, combattre et abattre le Blum. Ce dernier verbe paraîtra un peu fort de café: je me hâte d'ajouter qu'il ne faudra abattre physiquement Blum que le jour ou sa politique nous aura mené la guerre impie qu'il rêve contre nos compagnons d'armes italiens. Ce jour-là, il est vrai, il ne faudra pas le manquer." (Charles Maurras, L'Action française, 15 mai 1935)
Les camelots du roi manifestant sur le parvis de Notre-Dame, à l'occasion des fêtes de Jeanne d'Arc. Paris, 1908. © Roger-Viollet
Yvonneck: "La gueuse"
Il s'agit d'une transcription, des erreurs se sont donc peut-être glissées dans les paroles ci-dessous. N'hésitez pas à me faire part de vos remarques ou rectifications.
Caricature antisémite d'A. Lemot parue dans Le Pèlerin en 1909. Les députés et sénateurs ne sont que des pantins animés par des marionnettistes juif et franc-maçon.
4. S'appuyant sur le déterminisme racial et biologique théorisé par Jules Soury et Vacher de Lapouge, Maurras et sa clique, injurient les «étrangers plus ou moins naturalisés ou métèques».
Leur xénophobie est attisée par l'arrivée en nombre d'immigrants, surtout Belges, Italiens, Polonais, Juifs d’Europe centrale, pour compenser le faible taux d’actifs français (la natalité est alors en berne).
Les propagandistes de l'AF dénoncent "l'invasion" des métèques, accusés de voler le travail des Français et de dénaturer l'identité nationale par leurs mœurs singulières. Pour ces hommes, les étrangers « accaparent le sol de la France, (...) disputent aux travailleurs de sang français leur juste salaire (...). »
Bref, ces "quatre Etats confédérés" servent de coupables idéal et fournissent une clef d'explication pratique aux difficultés de l'heure. L'ennemi public varie d'ailleurs selon l'époque. Ainsi, le complot judéo-maçonnique cède le pas devant le complot judéo-communiste dans l'entre-deux-guerres.
Faisant fi de la complexité des phénomènes, les tenants du "nationalisme intégral" attribuent la "décadence" nationale à cette anti-France, dont il suffirait de se débarrasser pour résoudre les difficultés (principe du y-a-qu'à/ faut-qu'on).
Se dispensant d'analyses sérieuses, les pamphlétaires de l'AF et leurs épigones, usent de raccourcis et slogans démagogiques efficaces. (3)
Le théoricien Maurras a besoin d'hommes de mains. Aussi l'association d'étudiants monarchistes, connus sous le nom de "Camelots du roi", est fondée en 1908 par Maxime Real del Sarte. Les Camelots deviennent les troupes de chocs de l'AF, prompts à s'imposer lors de batailles rangées avec les organisations de gauche. Or, quoi de mieux pour galvaniser les troupes que d'entonner des chansons de combat?
Aussi, les Camelots se dotent d'un important répertoire musical, des chants de haine à entonner lors des descentes dans le quartier latin.
Dans la droite ligne des idées maurassiennes, la chanson interprétée ici par Yvonneck, voue aux gémonies les tenants de la démocratie: "youpins", francs-maçons, étrangers. Les députés, ("les coquins de la parlementerie") sont cloués au pilori, Briand, Jaurès et Fallières, promis à une triste fin, identique à celle du régime.
Après avoir estourbi la "gueuse", cette République abhorrée et importée ("A bas la Marianne / la fille à Bismark"), les Camelots sont invités à restaurer le régime qui a fait la France: la monarchie et ses valeurs "authentiques", partagées par tous les "vrais Français" (sic).
La violence du propos peut surprendre, mais elle démontre avant tout à quel point la liberté d'expression est alors considérée comme une valeur à respecter coûte que coûte, quitte à ce que les pourfendeurs du régime ne s'en servent. Au fond, les paroles de cette chanson rappellent la violence verbale de Maurras. Imprécateur en chef, il ira jusqu'à réclamer l'exécution de Léon Blum dans un article d'une rare abjection. (4)
------------------
Notes:
1. - L'Action française fustige les "juifs voleurs" et leur prétendue cupidité. Cet antisémitisme économique remonte au au Moyen Age, lorsque les Juifs se spécialisent dans les métiers de la finance en Europe occidentale, métiers alors interdits aux catholiques. Par un raccourcis saisissant, les Juifs sont alors accusés de ne s'intéresser qu'à l'argent. Certains socialistes font aussi des Juifs les fourriers du capitalisme.
- L'action française les accuse en outre d'être les "corrupteurs du peuple", et d'être à l'origine des affaires politico-financières qui fragilisent la République à l'instar du scandale de Panama, en 1892.
- En réaction à la laïcisation engagée par la République, les ultra-catholiques de l'AF réactivent l'antijudaïsme théologique de l'Eglise médiévale et considèrent les Juifs comme les « persécuteurs de la religion catholique »(le peuple déicide).
- La dénonciation du "complot juif " s'impose comme un thème récurrent censé expliquer tous les troubles politiques et sociaux qui affectent le régime.
- Le développement du concept pseudo-scientifique de la race à la fin du XIXème siècle fait du Juif un être inférieur, un apatride, «traître » en puissance, à l'instar du capitaine Dreyfus qui espionnerait pour le compte de l’Allemagne.
2. L’allusion se réfère aux lois scolaires de 1881 par lesquelles l’école est devenue gratuite, laïque et obligatoire pour les garçons et les filles jusqu’à treize ans. Cela heurte profondément l’Action française pour laquelle seules les élites sociales méritent d’être instruites, la masse ne devant pas accéder au savoir afin être mieux manipulée. D’autre part, elle connaît les arrière-pensées des Républicains : les nouvelles générations, en échappant à l’analphabétisme, seront gagnées aux valeurs nouvelles par les instituteurs, infatigables militants de la République.
3. Ralliée à l'Union sacrée lors de la grande guerre, l'Action française connaît son apogée après le confit et séduit de nombreux intellectuels qui se rapprochent de l'organisation (Bernanos, Maritain). La condamnation pontificale de 1926 et la mise à l'Index du quotidien portent un coup sévère à l'AF qui connaît néanmoins un regain de vigueur à la faveur des émeutes antiparlementaires du début de l'année 1934. Mais l'incapacité à profiter de la crise du 6 février 1934 et le départ de la jeune garde du mouvement, attirée par le fascisme (Rebatet, Brasillach) participent à la perte de son influence à la veille de la deuxième guerre mondiale. Favorable à Vichy, Maurras multiplie les attaques contre la Résistance et les Juifs, ce qui entraîne sa condamnation pour trahison par la cour de justice du Rhône (il sera gracié en 1952).
Si après guerre, l'AF n'existe plus en tant que mouvement politique structuré, son influence reste grande auprès d'une partie des intellectuels de droite (Pierre Boutang, Philippe Ariès, Roger Nimier).
4. Le 9 avril 1935, Charles Maurras écrit à propos de Léon Blum dans L'Action française: « Ce Juif allemand naturalisé, ou fils de naturalisé [...] n'est pas à traiter comme une personne naturelle. C'est un monstre de la République démocratique. [...] Détritus humain, à traiter comme tel [...] . L'heure est assez tragique pour comporter la réunion d'une cour martiale qui ne saurait fléchir. [Un député] demande la peine de mort contre les espions. Est-elle imméritée des traîtres ? Vous me direz qu'un traître doit être de notre pays : M. Blum en est-il ? Il suffit qu'il ait usurpé notre nationalité pour la décomposer et la démembrer. Cet acte de volonté, pire qu'un acte de naissance, aggrave son cas. C'est un homme à fusiller, mais dans le dos. »
Il récidive le 15 mai 1935 contre le leader de la SFIO: " C'est en tant que Juif qu'il faut voir, concevoir, entendre, combattre et abattre le Blum. Ce dernier verbe paraîtra un peu fort de café: je me hâte d'ajouter qu'il ne faudra abattre physiquement Blum que le jour ou sa politique nous aura mené la guerre impie qu'il rêve contre nos compagnons d'armes italiens. Ce jour-là, il est vrai, il ne faudra pas le manquer." (Charles Maurras, L'Action française, 15 mai 1935)
Les camelots du roi manifestant sur le parvis de Notre-Dame, à l'occasion des fêtes de Jeanne d'Arc. Paris, 1908. © Roger-Viollet
Yvonneck: "La gueuse"
Il s'agit d'une transcription, des erreurs se sont donc peut-être glissées dans les paroles ci-dessous. N'hésitez pas à me faire part de vos remarques ou rectifications.
La gueuse chantée par monsieur Yvonneck
Quand on pendra la gueuse au réverbère / Tout l'monde rigol'ra Tout Paris dans'ra.
On illumin'ra dans la France entière / Et pour les Youpins
Ça s'ra cett' fois l'coup du lapin /A bas la laïque / Et les Francs-maçons !
Qu'on les foute à l'eau / Dans l'pays des poissons / Briand nag'ra
Comme il a la manière / Et Jaurès boira ;
Son ventre' s'emplira ; / On verra sur le dos flotter Fallières
Et les députés / S'en aller comme les chiens crevés.
II Les cagoulards de la Franc-maçonnerie
/ ventre plein de pus, gavés et repus / Tous les coquins de la parlementerie
sans trêv' ni procès / rendront leurs comptes aux vrais Français
Vive la patrie, vive le drapeau, / la gueuse est malade et nous aurons sa peau.
Pour lui donner de dignes funérailles / Camelots du roi ??? / et plongez-y le cœur et les entrailles / dans le tout-à-l'égout /
elle s'y trouvera bien à son goût
III Pour dépouiller les gens de la République, / Camelot vas-y / pas besoin de fusil,
Ces lascars là, ça s'nettoie à coups d'trique ! : C'est des étrangers / Faut les souquer !
Faut pas t'gêner !
A bas la Marianne, / La fille à Bismarck / La France est à nous, la France est à Jeanne d'Arc !
Aux camelots déjà partis en guerre, / Tout le monde se joindra / Tout le monde y viendra
Le Roi sera le roi des prolétaires, : Roi des ouvriers et, / des brav'gens et des troupiers
Sources:
- Michel Winock: "Au nom de Dieu, de la nation et de la race", in L'Histoire, hors-série juillet-août 2010.
- Esther Benbassa (dir): Dictionnaire du racisme, de l'exclusion et des discriminations, Larousse, 2010.
- Laurent Joly: "Les débuts de l'Action française (1899-1914) ou l'élaboration d'un nationalisme antisémite." (Cairn.info)
Si je ne me trompe pas, le vers de fin est "Le Roi sera le roi des prolétaires, roi des ouvriers, roi des brav'gens et des troupiers"
RépondreSupprimer"ventre bien ?, gavés et repus" -> ventre plein de pus, gavés et repus.
RépondreSupprimerPour l'autre j'ai un doute :
"Camelots du roi ? sa loi" -> Camelots du roi, gendarmes de sa loi
Merci la Plume Blanche et à l'Anonyme pour leur aide. J'apporte de suite les modifications.
RépondreSupprimerBonjour,
RépondreSupprimerje pense que la transcription, déjà difficile en raison du son peu audible, est encore compliquée par l'usage d'un argot 1900 en partie incompréhensible aujourd'hui.
Effectivement la fin est :"roi des braves gens, roi des troupiers".
Je pense qu'il faut entendre "faut les souquer" et non faut les secouer. J'ai vérifié, c'est bien de l'argot "Belle époque" et je pense que c'est à l'origine de saquer, que tout le monde comprend encore. Dans les deux cas, un terme de marine.
Quant au vers "Camelot du roi ... etc.." je ne crois pas que ce soit "gendarme sa loi" car on ne saisit pas alors le sens. Il doit s'agir d'un verbe là encore argotique, à l'impératif, suivi de "et plonge-z-y le cœur et les entrailles" pour que la phrase se tienne. Mais je ne vois pas la solution, je l'ai cherchée aussi.
Merci pour ces propositions. Je corrige de suite.
RépondreSupprimerJ.
Paroles complètes ici : http://fr.lyrics.wikia.com/wiki/Yvonneck/La_gueuse
RépondreSupprimer(avec la solution pour la suite de "Camelots du Roi (...)" ("Chantards", "de Fallois", i.e. associations dans la mouvance de l'Af)).
Thibaud
Merci Thibaud pour ces informations. Je vais corriger les paroles.
RépondreSupprimerDe Fallois : s'agirait-il alors d'un nom propre, celui de Eugène Théodore de FALLOIS ?
RépondreSupprimerNé le 9 septembre 1889 - Paris
Décédé le 4 février 1915 - Bois de La Gruerie, Vienne-le-Château (Marne) , à l’âge de 25 ans
Inhumé - La Harazée, Bois de la Gruerie
Journaliste à "l'Action Française", sous-lieutenant au 161ème R.I
Mort pour la France, chevalier de la Légion d'honneur.
Proche de Ch. Maurras, il aurait, sans succès, tenté d'attirer vers 1900 le jeune de Lattre de Tassigny vers l'AF.
Chantard serait-il aussi un nom propre ?
Parce que, franchement, des associations d'étudiants monarchistes nommées les Chantard et le de Fallois, je n'en ai jamais entendu parler. Ce serait alors des groupes d'amis des personnes citées. D'où tenez-vous cette information ?
La solution me semble plus simple :
RépondreSupprimerPour lui donner de dignes funérailles
Camelot du Roi
Chambarde sa loi !
Et plonges-y le coeur et les entrailles
Dans l'tout à l'égout
Elle s'y trouv'ra bien à son goût !
Texte établi à partir du disque original (1909), sur http://www.phonobase.org/5074.html
Cela se tient
SupprimerSans doute avez-vous raison. Merci.