mercredi 24 juin 2015

Country Joe McDonald: "I-feel-like-I’m-fixin-to-die-rag" (1965)

                                                 Country Joe McDonald à Woodstock.

Fils d'un fermier et pasteur presbytérien chassé de l'Oklahoma par le Dust Bowl et d'une mère issue d'une famille juive d'immigrés russes sionistes, Joseph McDonald naît en 1945 à Washington. Membres du parti communiste, ses parents décident de prénommer leur rejeton Joseph, en hommage à Staline. (1)
Le petit Joe est l'archétype des Red diaper babies ("les bébés en couches rouges"), ces enfants de militants communistes blacklistés lors de la vague maccarthyste. De fait, en 1954, le père de Joe est renvoyé de son emploi à la compagnie de téléphone. Pour survivre, il vend des denrées alimentaires dans le ghetto noir de Watts, son fils accroché à ses basques. L'adolescent se réfugie dans la musique, en particulier les chansons engagées de Woody Guthrie. A 17 ans, il s'engage pour 3 ans dans la marine. De retour en 1961-62, McDonald s'inscrit à Berkeley où il fréquente le petit monde du folk et édite un fanzine militant intitulé  Rag baby. (2) Le numéro 5 d'octobre 1965 est accompagné d'un disque comprenant 4 titres, dont "I-feel-like-I'm-fixin'-to-die-rag", en version acoustique. La diffusion du morceau reste très confidentielle. Joe n'en continue pas moins de se produire dans les manifestations estudiantines du campus le plus politisé des Etats-Unis. (3) " C'était plein de révolutionnaires et de progressistes convaincus. La plupart étaient  des étudiants des classes moyennes qui avaient découvert l'injustice sociale et raciale, la théorie économique et qui étaient devenus des fanatiques", se souvient McDonald. 
 Plusieurs musiciens viennent épauler Joe et forment une sorte de fanfare politisée. Paraphrasant Mao pour lequel "le révolutionnaire doit se mouvoir parmi le peuple comme un poisson dans l'eau", le groupe se baptise The Fish. La nouvelle formation produit bientôt une musique psychédélique électrifiée, mâtinée d'acid rock En 1966, the Fish signe chez Vanguard Records qui publie leur premier album. Redoutant la censure, le patron du label refuse d'y faire figurer "I-feel-like-I'm-fixin'-to-die-rag". Finalement, le morceau figure sur le second album du groupe, en version électrique. Nous sommes en 1967 et  le titre ne rencontre toujours qu'un succès d'estime.

Comment cette chanson antimilitariste parvient-elle finalement à s'imposer comme un hymne de la contre-culture américaine?
Pour répondre à cette question, il est indispensable de se pencher attentivement sur le contexte socio-politique de l'époque.

"Allez, venez tous, vous les grands gaillards / Oncle Sam a encore besoin de votre aide/
Il est dans un sacré bourbier / Tout là-bas au Vietnam /
Alors laissez tomber vos livres /et prenez un fusil /on va vraiment bien se marrer
"

[premier couplet] 

Lorsque Country Joe compose sa chanson, en 1965, les Etats-Unis ne sont au Vietnam que depuis 6 mois. L'opinion approuve alors dans sa grande majorité l'intervention. Johnson jouit toujours d'une belle cote de popularité. Depuis la signature des accords de Genève, en 1954, qui entérinait la partition provisoire du Vietnam, les Etats-Unis soutiennent le régime dictatorial et corrompu du Vietnam sud (envoi de conseillers militaires américains). Redoutant que le pays ne bascule dans le communisme, les États-Unis interviennent directement. Ce faisant le président Johnson poursuit la politique initiée par John F. Kennedy, en envoyant des soldats en soutien aux forces locales. Le 2 août 1964, le destroyer Maddox est attaqué alors qu'il mène une opération secrète dans le Golfe du Tonkin. La riposte américaine ne se fait pas attendre. Cet incident local est présenté par le secrétaire d’État comme un "élément d'un mouvement communiste continu pour conquérir le Sud-Vietnam et éventuellement pour dominer et conquérir d'autres nations libres du sud-Est asiatique." Le 6 août, le Congrès vote à la quasi-unanimité la résolution du Golfe du Tonkin. Cette déclaration autorise la guerre qui va suivre. Les 3/4 des Américains soutiennent alors l'initiative  qui semble avoir répondu à ce "une agression caractérisée". Mais, ce qui était présenté au départ comme une intervention temporaire très limitée se transforme rapidement en une véritable guerre. Les communistes sud-vietnamiens (Viêtcongs) intensifient leurs actions dans le sud, tandis que des troupes du Vietnam (nord communiste) s'infiltrent au sud. L'armée sud-vietnamienne, désorganisée, semble totalement dépassée. Début 1965, Johnson décide de l'intensification des bombardements sur le nord-Vietnam (opération Rolling Thunder). Ce passage de représailles limitées à des bombardements continus n'est pas divulgué ou en tout cas fortement minimisé auprès de l'opinion publique américaine. 
Les bombardements impliquent l'envoi de GI's pour sécuriser les bases des bombardiers. Les effectifs de soldats enflent rapidement sans parvenir à rétablir la situation (de 184 000 soldats en juillet 1965 à 485 600 en décembre 1967). Les demandes de renforts se succèdent. L'enlisement des troupes au Vietnam se profilt. La spirale guerrière, tant redoutée, est bien là.

"Allez venez généraux, dépêchons-nous / Votre jour de chance est enfin arrivé /
Il faut sortir et attraper ces rouges / Un bon coco est un coco mort /dépêchons-nous /
Votre jour de chance est enfin arrivé / Il faut sortir et attraper ces rouges /
Un bon coco est un coco mort / Et vous savez que la paix / Pourra seulement être gagnée / Quand on les aura tous envoyés / Au royaume des cieux" [deuxième couplet]


Obnubilé par les bellicistes (faucons) et les conservateurs, Johnson ne prend pas conscience de la montée en puissance de l'opposition à la guerre, en particulier chez les jeunes, particulièrement concernés par la guerre. (4) L'adoption du Service Selective System en février 1966, étend la conscription aux campus, suscitant la colère des étudiants de tout le pays. L'annonce suscite la création de groupes d'étudiants refusant leur conscription (We won't go). D'aucuns prennent l'habitude de brûler leurs papiers militaires.
Johnson ne perçoit pas non plus que les dépenses militaires sont incompatibles avec les réformes sociales panifiées dans le cadre de la Grande Société. L'intensification et la brutalité des bombardements choquent un nombre croissant d'Américains. Les critiques fusent désormais à l'encontre de la politique étrangère du président: des minorités protestataires apparaissent au sein du parti démocrate, les républicains fustigent la mollesse de Johnson, lui reprochant de ne pas attaquer directement le nord-Vietnam. (5) Au fil des mois, on assiste à la lente érosion du soutien à la guerre, avec toutefois le maintien d'un solide groupe de personnes favorables à la poursuite des combats. La contestation s'avère multiforme. Elle se structure autour des étudiants, souvent appuyés par l'extrême gauche ou encore autour d'une partie de l'establishment (les intellectuels "sans couilles" qu'exècre Johnson, la presse, quelques poids lourds du Congrès...). La contestation  amalgame bientôt des groupes venus de divers horizons. Ainsi, les manifestants des droits civiques s'associent bientôt dans les manifestations aux anti-guerre. Le 4 avril 1967, Martin Luther King dénonce d'ailleurs la guerre du Vietnam sur le plan moral.
300 000 personnes se réunissent à New York et San Francisco le 15 avril 1967. Les jeunes appelés brûlent désormais leurs livrets militaires. Le FBI est sur les dents, mais peine à mesurer l'ampleur de la mobilisation. Les manifestations dans de nombreuses villes et autour de la Maison Blanche pèsent désormais sur tous les déplacements présidentiels. La cote de popularité du président dévisse; et ce d'autant qu'au cours de l'été 1967, de très graves émeutes raciales éclatent dans la plupart des grandes villes américaines.  




* "Dans une impasse."
Dans la nuit du 30 au 31 janvier 1968, en pleines festivités du Têt, le jour de l'an vietnamien, les troupes nord-vietnamiennes et le Viêtcong déclenchent une vaste offensive dans tout le pays. C'est un échec, mais les images et reportages diffusés par les médias américains bouleversent l'opinion publique. Tout ce que souhaitaient dissimuler l'armée et les autorités ressurgit alors au grand jour.
 Certes, dans les jours qui suivent, les Américains font front avec leur président, mais cela ne dure guère. Une issue rapide au conflit semble de plus en plus incertaine comme le résume parfaitement Walter Cronkite, le grand éditorialiste de CBS:"Si nous affirmions être aujourd'hui plus proches de la victoire, nous ferions confiance à ceux qui, de toute évidence, se sont toujours trompés jusqu'à maintenant. Mais, si nous suggérions que la défaite est imminente, nous manifesterions un pessimisme excessif. La seule conclusion réaliste, si peu satisfaisante qu'elle soit, est que nous sommes coincés dans une impasse." (le 27 février 1968) 
La lassitude gagne du terrain. Clark Clifford, nouveau secrétaire d’État à la défense constate amer: "On dirait que nous sommes devant un puits sans fond. Nous envoyons plus d'hommes, ils en font autant. Nous augmentons encore, ils font de même. Je vois de plus en plus de combats avec de plus en plus de pertes américaines, sans issue en vue."
En mars 1968, 78 % des Américains sont persuadés que leur pays est enlisé au Vietnam et qu'il ne peut pas gagner.
Johnson doit se rendre à l'évidence. Le 31 mars 1968, il annonce qu'il ne se représentera pas aux élections présidentielles de la fin d'année. La succession d'évènements dramatiques accroît encore le malaise et les violences d'une société malade. L'assassinat de Martin Luther King, le 4 avril 1968 provoque de très graves émeutes  à travers tout le pays, au point que des troupes doivent même être déployées à Washington et Chicago. Au mois d'août 1968, en marge de la Convention démocrate de Chicago, des manifestations sont sauvagement réprimées. Horrifiée, l'Amérique profonde offre ses suffrages à Richard Nixon qui avait pris soin au cours de la campagne présidentielle de présenter « une autre voix, une voix tranquille dans le tumulte des cris. C'est la voix de la grande majorité des Américains, les Américains oubliés, ceux qui ne crient pas, ceux qui ne manifestent pas. Ils ne sont ni racistes ni malades. Ils ne sont pas coupables des fléaux qui infestent notre pays. » La contre-révolution de droite est en marche...

"Et ça fait, un, deux, trois / Pourquoi nous battons-nous ? / Ne me demandez pas, je m’en fous / Prochain arrêt Vietnam / Et puis cinq, six, sept / Ouvrez les portes du paradis /
Pas le temps de nous demander pourquoi / Youpi ! on va tous mourir Allez, mères à travers le pays / Préparez le sac de votre fils pour le Vietnam /
Allez pères n’hésitez pas / Envoyez les avant qu’il ne soit trop tard soyez les premiers du quartier / à voir votre fils rentrer dans un cercueil." [troisième couplet]


La situation des troupes engagées au Vietnam s'avère de plus en plus difficile. Les généraux de l'US army  disposent d'armes conventionnelles sophistiquées, mais tout cet arsenal s'avère de peu d'utilité face à la guérilla vietminh, fondée sur les principes de la guerre révolutionnaire. Les GI's suréquipés ne peuvent contrer un ennemi qui se cache dans la jungle et procède par embuscades. L'usage d'armes redoutables, telles que le napalm ou les défoliants, provoquent des milliers de victimes, combattants comme civils. 
La médiatisation du conflit met en lumière les atrocités de cette "sale guerre". Ainsi, en mars 1969, le New York Times révèle le terrible massacre de centaines de Vietnamiens perpétré par des soldats américains dans le village de My Lai. 
Le désengagement militaire  s'engage sous la présidence de Richard Nixon. Tout en recherchant encore une solution militaire, par une intensification des bombardements, Nixon "vietnamise" le conflit, les troupes américaines étant peu à peu remplacées par des soldats vietnamiens. Les interminables pourparlers de paix se soldent par la signature des accords de Paris, le 23 janvier 1973. La guerre ne se termine toutefois qu'avec la prise de Saïgon par les communistes en 1975. On dénombre au total 57 000 morts américains, 300 000 Sud-Vietnamiens combattant à leurs côtés, et plus d'un million de combattants communistes (Vietminh et Vietcong). 
Cette première défaite militaire des États-Unis constitue un véritable traumatisme, une crise morale pour le pays et son modèle. L'impérialisme américain est dénoncé par la jeunesse du monde entier, en particulier les hippies et leur super héraut: Country Joe. 


* Gimme an F.
Au cours de l'année 1968, "l-feel-like-I'm-fixin'-to-die" s'impose comme un hymne de la contestation évident. La notoriété nouvelle du morceau n'est liée ni aux paroles ni à la musique, mais à l'interprétation spectaculaire qu'en donne désormais Country Joe lors de ses concerts. Le groupe prend l'habitude de faire précéder le morceau d'un rituel amusant: le "Fish cheer", une parodie des cris de guerre des équipes sportives de lycées. En introduction à la chanson, le chanteur lance: "Gimme an F" (donnez moi un F), avant de demander un I, un S et un H. Puis, en réponse à la question "what's that spell?" (comment cela s'épelle-t-il?), le public crie à trois reprises le mot Fish. En juin 1968, alors que le groupe se produit à Central Park, le batteur du Fish rompt ce rituel en substituant Fuck à Fish. Le public est ravi, à la différence des représentants du Ed Sullivan Show, présents dans la salle. Ces derniers font aussitôt savoir au groupe, qui avait signé un contrat pour un passage télé à venir, que tout est annulé (sauf le cachet déjà versé aux musiciens). Même si le Fuck cheer complique l'accès du groupe aux salles de concerts, Country Joe n'en a cure et le Fuck cheer s'impose définitivement. A Woodstock, le chanteur le fait hurler à cinq reprises à la foule réunie. Grâce à cette prestation tonitruante, Country Joe acquiert une notoriété internationale, tandis que "I-feel-like-I'm-fixin'-to-die-rag" accède au rang d'hymne de la contre-culture contestataire. 

Le festival de Woodstock se tient près de la ville de Bethel, dans l'Etat de New-York, du 15 au 17 août 1969. Country Joe & the Fish doivent jouer le dimanche soir. Mais, Joe monte seul sur scène dès le vendredi après-midi à la faveur d'un trou dans la programmation. Le public ne prête alors que peu d'attention aux premiers morceaux interprétés. Désarçonné, le chanteur cherche conseil auprès de son manager. "Il m'a dit, 'Personne ne fait attention à toi. Qu'est-ce que ça peut bien faire ce que tu joues? ' (...) alors j'y suis retourné et j'ai crié: 'Donnez-moi un F! Ils se sont tus, puis ils ont hurlé 'F!'. J'ai pensé, 'ouah, c'est bizarre', alors j'ai continué. C'était assez surprenant parce que je ne savais pas qu'autant de gens connaissaient la chanson." [cf: entretien accordé à Dorian Lynskey]
Le Fuck cheer, suivi de l'interprétation d'I-feel-like-I'm-fixin'-to-die-rag constitue assurément d'un des moments forts du festival, heureusement immortalisé dans un documentaire sorti en 1970. L'enthousiasme du public, qui reprend en chœur les lettres scandées par le chanteur, prouve qu'avec ce morceau Country Joe a su, mieux que tout autre, saisir l'air du temps. A un moment, où l'intervention américaine au Vietnam reste largement nimbée de mystère, Country Joe pressent l'escalade militaire et l'hécatombe à venir. I-feel-like-I'm-fixin'-to-die-rag exprime à merveille les sentiments confus de l'apprenti soldat. La musique enjouée, qu'on dirait tout droit sortie d'un bastringue minable, apparente le titre à une sorte de danse macabre médiévale. L'ironie grinçante du morceau fait mouche. "Elle possède un fatalisme insouciant, presque amoral, assez éloigné des autres morceaux pacifistes. " (cf: Dorian Lynskey) Pour son auteur, "le personnage de la chanson ne s'excuse de rien, il ne dit rien à propos de la paix dans le monde, il ne dit pas qu'il s'en veut de tuer des gens. Elle tourne en dérision l'idée de tuer des gens."  






" I-Fee-Like-I'm-Fixin'-to-die rag"

"Come on all of you big strong men /
Uncle Sam needs your help again /
he's got himself in a terrible jam /
way down yonder in Viet Nam /
so put down your books /
and pick up a gun /
we're gonna have a whole lotta fun
Come on generals, let's move fast /
your big chance has come at last /
now you can go out and get those reds /
cos the only good commie is the one that's dead /
and you know that peace /
can only be won /
when we'veblown 'em all /
to kingdom come /

(CHORUS)
And it's one, two, three, /
what are we fighting for? /
don't ask me I don't give a damn, /
next stop is Viet Nam /
And it's five, six, seven, /
open up the pearly gates /
ain't no time to wonder why, /
whoopee we're all gonna die /

Come on mothers throughout the land /
pack your boys off to Viet Nam /
come on fathers don't hesitate
send your sons off before it's too late /
and you can be the first ones on your block /
to have your boy come home in a box




Notes:
1. Au cours de la seconde guerre mondiale, les Américains prennent l'habitude d'appeler affectueusement ce dernier Country Joe ("Joe le Péquenaud"). Joe McDonald adoptera également ce qualificatif une fois adulte.
2. Les folkeux s'engagèrent tôt dans le mouvement pacifiste. En 1965, une manifestation organisée par le Students for Democratic Society à Washington, réunit Joan Baez, les Freedom Singers, Judy Collins et Phil Ochs. Chez les rockers, en revanche, la contestation reste très marginale, l'opposition à la guerre très timorée. Enfin, rappelons que la chanson consacrée au Vietnam la plus vendue est l'épouvantable "Ballad of the Green Berets", hymne patriotique à la gloire de l'unité d'élite de l'US army. 
3. le Free Speech Movement de Berkeley paralyse le campus pour protester contre l'interdiction de tout militantisme à l'intérieur de l'université.
4. 4. En effet, l'âge minimum d'incorporation est de 17 ans. Les recrues ont 19 ans de moyenne d'âge et 90 % des appelés ont moins de vingt ans. 
5.  Jamais un débarquement de troupes au nord du 17ème parallèle n'est envisagé. La guerre est étroitement circonscrite afin de ne pas précipiter la Chine dans le conflit aux côtés du Vietnam nord. 

Sources: 
-Dorian Lynskey: "33 Révolutions par minute", éditions Payot & Rivages, 2012.
- Le nouveau dictionnaire du rock, Michka Assayas (dir.), Bouquins, Robert Laffont, 2014.
- Jacques Portes: "Lyndon Johnson _ le paradoxe américain", Biographie Payot, 2007.
- Yves Delmas & Charles Gancel: "Protest song. La chanson contestataire dans l'Amérique des sixties", les éditions Textuel, 2005.


Lien:
- Le carnet de recherches de Patrick Peccatte: La bande son du Vietnam.

dimanche 7 juin 2015

299. David Bowie, Space Oddity, (1969).



Ground Control to Major Tom 
Ground Control to Major Tom
 Take your protein pills and put your helmet on

 Ground Control to Major Tom
 Commencing countdown, engines on
 Check ignition and may God's love be with you

 [spoken] Ten, Nine, Eight,  Seven, Six, Five, Four, Three, Two, One, Liftoff

 This is Ground Control to Major Tom
 You've really made the grade
 And the papers want to know whose shirts you wear
 Now it's time to leave the capsule if you dare

 This is Major Tom to Ground Control
 I'm stepping through the door 
And I'm floating in a most peculiar way
 And the stars look very different today

 For here Am I sitting in a tin can
 Far above the world 
Planet Earth is blue
 And there's nothing I can do

 Though I'm past one hundred thousand miles
 I'm feeling very still
 And I think my spaceship knows which way to go
 Tell my wife I love her very much she knows 

 Ground Control to Major Tom
 Your circuit's dead, there's something wrong
 Can you hear me, Major Tom? 
Can you hear me, Major Tom? 
Can you hear me, Major Tom? 

Can you.... 
 Here am I floating round my tin can
 Far above the Moon 
Planet Earth is blue 
And there's nothing I can do.

Contrôle au sol au commandant Tom
Contrôle au sol au commandant Tom
Prenez vos pilules protéines et mettez votre casque 

(décompte parlé) Dix, neuf, huit, sept, six, cinq, quatre, trois, deux, un, décollage.
Contrôle au sol au commandant Tom
Commencez le compte à rebours
Propulseur ok? et que Dieu soit avec vous.

Ici contrôle au sol au commandant Tom
Vous vous êtes vraiment montré à la hauteur
Et les journaux veulent savoir d'où viennent ces chemises que vous portez
Mais c'est l'heure de quitter la capsule si vous l'osez.

Ici le commandant Tom au contrôle au sol
Je suis sorti
Et je flotte d'une façon très bizarre
Et les étoiles semblent très différentes aujourd'hui.

Ici 
Suis assis dans une boîte de conserve
 Loin au-dessus du monde.
Le planète Terre est bleue
 Et il n'y a rien à faire que je puisse faire

Même si j'ai parcouru plus de cent mille miles,
Je me sens très calme
Je pense que mon vaisseau sait quelle route emprunter
Dites à ma femme que je l'aime énormément, elle sait

Contrôle au sol au commandant Tom 
Votre circuit est mort, il y a quelque chose qui cloche
M'entendez-vous, commandant Tom ?
M'entendez-vous, commandant Tom ?
M'entendez-vous, commandant Tom ?

M'entendez vous....
Me voici flottant autour de ma boîte de conserve,
Bien au dessus de la Lune
La planète Terre est bleue
et il n'y a rien que je puisse faire


En histoire, certaines dates sont des moments de bascule. N’hésitons pas à marteler cette vérité trop souvent minorée : 1969 est une année essentielle dans l’histoire de l’humanité. Puis, dressons ici un inventaire à la Prévert du foisonnement des petits évènements et grands soubresauts qui rythment cette année mythique que d’autres ont qualifiée d’érotique[1] cette dernière marche des swinging sixties vers les embrumées seventies.

Sur les écrans noirs de nos nuits blanches Denis Hopper projette Easy Rider, le road-movie des motards qui appuient sur l’accélérateur car ils sont Born to be wild[2]. L’armée des ombres de J.-P. Melville chronique magistralement la résistance incarnée par le fine fleur des acteurs français. Après avoir mis le feu sur scène à sa Stratocaster en 1965 à Monterey, Hendrix échauffe le public de Woodstock à l’été. Le 18 août 1969, les distorsions de sa guitare sonnent comme une pluie de bombes sur les villages du nord Vietnam en clôture du festival[3] ; Altamont, à l’opposé géographique, est la fête ensanglantée des Stones[4] ; en Europe les Beatles chantent sur les toits de Londres[5] et mettent deux 33 tours sur le marché. Entre Yellow Submarine et Abbey Road, Lennon quitte le groupe, les Fab Four disparaissent dans le crépuscule des 60’s.

Depardon au Biaffra,
photo de G. Caron 1968.
Le front des guerres se porte bien du Vietnam à l’Irlande Du Nord. Les civils en sont les victimes les plus exposées : au Biafra, les enfants meurent de faim sous les yeux de quelques photos reporters dont Caron et Depardon ; la valse des dictateurs poursuit son tourbillon en Espagne, en Lybie. Les coups d’états s’enchainent au Brésil et succèdent aux évictions brutales à l’instar de celle de Dubček en République Socialiste Tchécoslovaque qui prémices à des mises au pas sévères. Le front des protestations prend des allures dramatiques quand Jan Palach s’immole à Prague ou quand les émeutes du quartier d’Ardoyne à Belfast ensanglantent les rues.

Alors qu’au sol résonne dramatiquement le bruit des bottes, il est presque apaisant de lever les yeux vers le ciel de Toulouse, pour y voir s’envoler, en mars, le Concorde.

En juillet, c’est au tour des Américains de s’envoler mais  plus loin ; les astronautes d’Apollo décollent à l’été en direction de la Lune sur laquelle ils plantent la bannière étoilée. Ils ne parviennent pas tout à fait à éclipser l’événement incontournable cette riche année qui a lieu le 6ème jour du mois d’octobre : ma naissance.


1.     De la Terre à la Lune : une nouvelle frontière


La conquête de l’espace a, très tôt, nourri les imaginaires et rythmé la vie politique des années d’après-guerre. En effet, ce projet fou a alimenté un nombre incalculable de fictions qui ont été ensuite rattrapées par la réalité. Dans le cadre spécifique de la guerre froide ces vols spatiaux successifs sont devenus un des théâtres majeurs de l’affrontement est-ouest. Parfois il fut même difficile de démêler la réalité de la fiction tant l’industrie hollywoodienne a sans arrêt recyclé certains épisodes de cette aventure, quand elle ne l’a pas tout bonnement anticipée.

Au cinéma, l’exploration possible  de l’espace a donné lieu à de très kitsh production comme Forbidden Planet en 1956. Douze ans plus tard, Kubrick donne une touche métaphysique à sa science-fiction filmée dans 2001, odyssée de l’espace. Hergé a précédé les cinéastes : avec Objectif Lune et On a marché sur la Lune ; par deux tomes publiés au début des années 50,  il a déjà projeté son héros Tintin dans l’espace, emboitant le pas aux supers héros des comics américains. La littérature n’est pas moins concernée : Ray Bradbury publie son recueil de Chroniques Martiennes à l’aube des années 50, Franck Herbert s’inscrit dans son sillage en 1965 en publiant Dune.




















La situation géopolitique mondiale n’est pas étrangère à l’abondance de ces productions. Depuis 1947, l’union des anciens alliés de la 2ème guerre mondiale a laissé place à un affrontement idéologique entre 2 blocs antagonistes.  Le bloc communiste est constitué de l’URSS et des pays d’Europe de l’Est que l’Armée Rouge a libéré à la fin de la guerre. Les gouvernements  des ces états sous influence sont contraints de se rallier au grand frère soviétique (par le biais d’élections fantoches notamment) dont ils deviennent, dit-on souvent, des satellites. Le bloc capitaliste est soudé derrière des Etats-Unis. Il réunit surtout des pays d’Europe de l’Ouest.

Ce clivage donne lieu à une découpe à l’emporte-pièce de la planète : chaque camp tente d’étendre au maximum sa zone d’influence ; les tensions voire les conflits ouverts éclatent à leurs points de contact : à Berlin et en Allemagne entre 1949 et 1961 qui se scinde en une RFA, à l’ouest, et une RDA, à l’est, mais aussi en Corée divisée en 2 états distincts en 1953 ;   le Vietnam, à peine indépendant, s’enfonce dans une guerre opposant de plus en plus ouvertement les Américains, alliés du Sud, au Vietnam Nord soutenu par la Chine.


Ces affrontements indirects sur des territoires annexes sont caractéristiques de ce que l’on appelle la guerre froide. Outre l’opposition idéologique et militaire chaque camp s’engage dans une course aux armements nucléaires couteuse et effrayante elle s’étend rapidement à des domaines parfois inattendus. Les deux blocs s’opposent en effet, aussi bien sur leurs conceptions de l’économie qu’au travers de leurs productions artistiques. Même les terrains de sport deviennent des fronts avancés du conflit. Dans cette compétition entre les deux camps, l’espace est une « nouvelle frontière » à part entière qu’il convient de dépasser puis de s’approprier pour affirmer sa supériorité sur l’ennemi. Chaque pas en avant, quel qu’en soit la nature, fait l’objet d’une instrumentalisation politique car il atteste d’une défaite du camp adverse et valide le système capitaliste à l’ouest et communiste à l’est adopté par le vainqueur.



Dans la conquête de cet au-délà de la Terre qui a alimenté tant de peurs et de rêves, l’ouverture des hostilités revient au camp soviétique. C’est en effet le premier vol orbital habité réussi par Youri Gagarine qui donne le top départ de la course à l’espace. Nous sommes en 1961. En 1957, la petite chienne Laïka y avait précédé les hommes. Elle y gagna une gloire posthume à défaut d’en revenir vivante. La réussite de Gagarine ne peut alors laisser de marbre l’adversaire Occidental. Le 25 mai 1961, Kennedy prononce son discours sur « la nouvelle frontière ». Parvenu presque au terme de celui-ci qui opère une belle mise en perspective avec  l’un des grands mythes fondateurs des Etats-Unis, il énonce  clairement que la course à l’espace sera le nouveau défi du pays dont il fait habilement vibrer la fibre patriotique :

But I tell you the New Frontier is here, whether we seek it or not. Beyond that frontier are the uncharted areas of science and space, unsolved problems of peace and war ….
L’effort financier des Etats Unis, très conséquent, leur permet d’entrer dans la compétition : si Shepard emboite le pas à Gagarine en mai 61, le pas décisif pour l’humanité[1] a lieu en juillet 1969 lorsque Neil Amrstrong plante la bannière étoilée sur le sol lunaire. Le symbole est très fort, et partagé en léger différé via les lucarnes télévisuelles. L’exploit et ses prolongements scientifiques sont, on l’aura compris, bien moins importants que leur instrumentalisation politique.
Dans cette grande aventure de la conquête spatiale qui s’intensifie dans les années 60, il y a Gagarine, Shepard, Armstrong. Mais il y a un autre astronaute, d’une envergure singulière, un véritable spécialiste du franchissement des frontières : nous appellerons, pour le moment, sobrement  cet  homme, le Major Tom.





David Bowie sur orbite : la fin des frontières ? 

L’histoire de Space Oddity s’inscrit pleinement dans cette séquence qui recompose les rapports réels ou imaginés entre l’homme et l’espace. La naissance de la chanson se situe quelque part entre le 6 janvier 1969 lorsque sort le numéro spécial du Times sur le vol Apollo 8 illustré par la célèbre photo de Bill Anders Earthrise[7] et une séance de cinéma dans un état second consacrée au film  de Kubrik. Son auteur, David Jones alors 22 ans. 

Bill Anders, Earthrise, 1968.

Il est plus connu sous son pseudonyme : David Bowie. Bowie a entamé une carrière musicale depuis le milieu des années 60 dans une Angleterre du baby-boom ouverte aux influences musicales venues d’Outre-Atlantique. Il intègre différents groupes comme les Kon-rads ou les King-bees et s’essaie à différents styles. Son premier album éponyme montre un grand éclectisme musical. Hélas il est commercialisé au même moment qu’une bombe atomique musicale ; propulsé sur le marché du disque le même jour que Sergent Pepper’s Lonely Hearts Club Band, le disque subit la sanction de la mort subite. Deux ans plus tard, un David Bowie aux cheveux plus longs et bouclés enregistre Space Oddity. L’album comporte une chanson homonyme dont le texte d’un style très narratif raconte comment Le Major Tom est envoyé dans l’espace. Le premier couplet rend compte du lancement de son vaisseau spatial ; cette réussite lui vaut l’intérêt des médias qui s’interrogent même sur la couleur de son t-shirt. Major Tom reçoit alors de la base l’ordre de quitter la capsule spatiale pour une sortie dans 

For here, Am I sitting in a tin can, Far above the world, planet Earth is blue and there’s noting I can do.
Subjugué par cette vision bleutée, Major Tom fait alors ses adieux à la base qui perd définitivement sa trace.

Ce titre fait le succès de Bowie par un heureux hasard venu compenser la malchance subie par l’album précédent. A l’été 1969, entre le 16ème  et le 24ème jour de juillet précisément, la télévision nationale britannique plus connue sous l’acronyme B.B.C. (British Broadcast Corporation) couvre le voyage vers la Lune d’Apollo 11. La chaine se mobilise, à la hauteur des enjeux ; ses journalistes invitent, en plateau, de prestigieux comédiens. Ainsi, Ian McKellen et Judi Dench déclament-ils, pour l’occasion, textes et poésies dédiés à la Lune. La musique est partie prenante du show: on y entend notamment Moonhead, un morceau composé spécialement pour l’occasion par les Pink Floyd. La B.B.C. choisit Space Oddity  pour servir de fond sonore à sa couverture médiatique. Epousant parfaitement l’événement, le tempo lent du titre accompagne le rythme des images spatiales. Son succès commercial est dès lors assuré, Space Oddity se classe en tête des charts.

La valse à 3 temps que David Bowie entame avec le succès musical et l’espace n’en est pourtant  qu’à son 1er acte. En 1972, il enregistre le titre Starman dans lequel il est question d’un homme venu d’ailleurs qui souhaite entrer en contact avec les humains. C’est une deuxième accélération dans sa carrière. Au soir du 6 juillet 1972, dans la très populaire émission musicale anglaise de Top of the Pops, des milliers d’adolescents britanniques découvrent quelque peu médusés un David Bowie en combinaison aussi moulante qu’extravagante, cheveux roux en brosse, ongles peints, doté d’un regard hypnotique, affublé d’un guitariste (Mick Ronson) qui porte le cheveu long et la combinaison dorée, son bassiste (Trevor Bolder) réenchantant, quant à lui, le port cultissime de la rouflaquette. Ce n’est pas tant la chanson que la prestation à Top Of The Pops qui change le cours des choses. Le journaliste anglais Dylan Jones est parti de ce moment précis pour expliquer dans son livre L’ovni Bowie[8] la déflagration produite. Il introduit ainsi sa démonstration :

Ce fut un moment éphémère te tissé d’or. Inoubliable. Après le 6 juillet 1972, la musique ne serait plus jamais tout à fait la même. La déflagration se produisit dans la soirée de manière totalement inattendue. Personne n’avait rien vu venir. [] Sa performance transfigura la jeunesse d’une nation toute entière [] Cet événement a profondément marqué des centaines de milliers de jeunes de ma génération. Il a contribué à faire basculer nombre d’entre nous dans l’adolescence et à nous faire rêver de bouleversements capillaires  nouvelle coupe ou teinture orange, voire les deux. C’est l’un des moments qui a rendu possible l’avènement du punk, qui nous ont incité à  scruter par de là l’horizon pour y déchiffrer notre avenir.[9]
Le Major Tom que l’on croyait perdu dans l’espace pour toujours resurgit pour le dénouement de la pièce en 1980. La carrière de Bowie est celle d’un caméléon (ou d’un vampire dirait J.-D. Beauvallet[10]), s’accaparant les influences comme le lézard les couleurs, sans que cela le protège pour autant du monde extérieur (les passages à vide et l’usage immodéré des drogues sont là pour le rappeler). Bowie franchit successivement les frontières entre les arts mêlant à sa musique, à ses spectacles les influences du théâtre, du mime, du cinéma, de la mode. Les frontières nationales ne résistent pas davantage à sa créativité le Japon, l’Allemagne, la Belgique de Brel, la France sont des sources d’inspiration inépuisables. Christophe Conte compare l’œuvre échafaudée par David Jones à une grande armoire dans laquelle les jeunes pousses musicales des années 80 viennent allègrement braconner[11]. Les frontières générationnelles sont à leur tour abolies. Il laisse entendre que cela pourrait être une des raisons du retour du Major Tom. Sur l’album Scary Monsters, on le retrouve dans le titre Ashes to ashes : c’est un homme brisé, un junkie. L’album et le titre viennent damer le pion aux héritiers dans les chiffres de vente. Bowie entre dans les années chic et toc. Le cycle de l’ailleurs se clôt, il faut passer  à autre chose à l’aube des années 80, au matérialisme, à la réussite clinquante, au palpable.

L’étrange odyssée spatiale du Major Tom a peut être quelque chose à voir avec celle d’Ulysse, elle tient du  long voyage dont on n’arrive pas tout à fait à revenir sans y perdre de son âme. Née en 1969, ses racines sont plus anciennes, ses prolongements vont au delà des années 80 ; dans l’exposition Bowie IS[12] qui tourne en Europe depuis 2013, la place de Space Oddity atteste de l’importance de ce titre dans l’histoire de la musique pop-rock du XXème siècle. Telle est sa place, incontournable, comme l’année qui l’a vue naître.




Pour Désirée & Alain en souvenir de l'acte 3 à la Philharmonie.

Pistes bibliographiques : 
S. Bernstein, P. Milza, Histoire du XXème siècle, Paris, Hatier, Initial, 1995, T.2.
David Bowie Is, catalogue de l'exposition, V&A pubishing, London, 2013.
D. Jones, L’ovni Bowie, Paris, Rivage Rouge, 2015.
Les vies de Bowie, Les Inrocks2, Paris, 2013




[1] Titre de Serge Gainsbourg interprété avec Jane Birkin, 69, année érotique sorti chez Phillips en février 1969.
[2] Titre du groupe Steppenwolf Born to be wild figure sur la Bande Originale du film, ainsi que The Pusher, signé du même groupe.
[3] C’est particulièrement le cas lorsqu’il revisite l’hymne américain The Star-Spangled Banner
[4] Ce festival a lieu en Californie quelque temps après Woodstock. Le service d’ordre des Stones composé de Hells Angels est impliqué dans le décès d’un spectateur alors que le concert tourne à l’émeute.
[5] Très exactement sur le toit d’Apple Records leur maison de production située au n°3 de Saville Row.
[6] Selon l’expression de l’astronaute Neil Armstrong lorsqu’il s’apprête à poser le pied (gauche) sur le sol lunaire.
[7] La photo est prise par l’astronaute à partir du vol Appolo 8 le 24 décembre 68.
[8] D. Jones, L’ovni Bowie, Paris, Rivage Rouge, 2015.
[9] D. Jones, L’ovni Bowie, Paris, Rivage Rouge, 2015, p15.
[10] J.-D. Beauvallet, Caméléon ou vampire ?, Les Inrocks2, Paris, 2013, p 56-58.
[11] C. Conte, Avide Bowie, Les Inrocks2, Paris, 2013, p 46-49.
[12] Porgrammée au printemps 2013 au Victoria&Albert Musuem de Londres, l’exposition a depuis fait halte à Berlin et plus récemment à la Philarmonie de Paris où elle vient de fermer.