Au cours des années 1920, la prohibition est mise en place aux Etats-Unis. La production, la vente, le transport, l'importation, l'exportation et la consommation d'alcool sont alors interdits sur l'ensemble du territoire américain. La prohibition favorise aussitôt le développement de la Mafia. Des gangs rivaux s'affrontent alors dans les grandes villes afin de s'assurer le contrôle du trafic d'alcool. Quelques unes des grandes figures de la pègre se font alors un nom comme Dutch Schultz, Meyer Lansky, Lucky Luciano.
Le plus célèbre de ces truands reste Al Capone, surnommé "Scarface". Ce fils d'immigrés italiens naît à Brooklyn, en 1899. En 1925, il s'affirme comme un des pontes du commerce d'alcool à Chicago. Les gangs rivaux s'affrontent alors pour le contrôle des différents quartiers de la ville. Le 14 février 1929, sept membres d'une bande rivale d'Al Capone sont exécutés. Les autorités accusent aussitôt ce dernier d'être le commanditaire du "massacre de la saint-Valentin".
Capone est arrêté le 17 mai 1929 pour port d'arme prohibée. Après une année passée en prison, il est libéré. En juin 1931, accusé de fraude fiscale et d'infraction aux lois sur la prohibition, il écope de 11 ans de prison. Après 7 années d'incarcération à Atlanta, puis Alcatraz, il est libéré. Il meurt chez lui, en Floride, en 1947.
De son vivant déjà, Capone devient une figure de la mafia et rapidement il est élevé au rang de mythe. Son aura dépasse très vite les frontières des Etats-Unis. En Jamaïque, la fascination pour tout ce qui peut remettre en cause l'ordre établi et rendre la vie impossible aux forces de l'ordre soulève la sympathie. Prince Buster interprète ici un ska à la gloire de Capone. Les paroles, faciles à retenir sont les suivantes: "Don't call me scarface, my name is Capone. C*A*P*O*N*E."
Prince Buster.
Buster est une figure quelque peu oublié de la musique jamaïcaine, beaucoup moins célébrée que Bob Marley, Jimmy Cliff ou Burning Spear, pourtant son rôle dans la genèse du ska n'est pas à négliger.
Solide boxeur, il fut d'abord enrôlé par Coxsone Dodd pour assurer la sécurité de son sound system. Très vite, il grave quelques unes des faces les plus mémorables de l'ère ska dont ce savoureux Al Capone au son brut et agressif. La reprise de certains de ses morceaux par les groupes de ska anglais dans les années 1980 lui assureront une certaine notoriété de ce côté de l'Atlantique (la reprise du fameux One step beyond par Madness).
Je ne vous présente pas Akhenaton, membre du groupe de rap IAM, qui mène en parallèle une carrière solo plutôt réussie comme en témoigne l'album Métèque et Mat sorti en 1996 dont est issue ce titre. Akhenaton nous raconte la vie d'un membre de la Mafia. En le suivant, nous découvrons l'histoire de cette organisation.
Pour tout ce qui concerne la Mafia, le doute a longtemps été plus fort que les certitudes. Depuis les années 1980 et le témoignage des premiers repentis d'importance (Tommaso Buscetta notamment), le voile s'est en partie levé sur le fonctionnement de "l'honorable société". Les procès lancés par les juges Falcone et Borsellino (ils y ont laissé la vie en 1992 et 1993) ont été des premiers pas dans une lutte jamais finie contre une organisation qui n'aime rien tant que l'on ne parle plus d'elle...
Apparue autour de Palerme dans la deuxième moitié du XIXème siècle, Cosa Nostra ("Notre chose" ou "Ce qui est à nous", c'est ainsi que les mafieux appellent leur organisation) a su prospérer et s'adapter aux changements du monde moderne. L'historien John Dickie écrit sur ses origines : "En supplantant le féodalisme, l'Etat moderne était supposé avoir le monopole de la violence, c'est-à-dire le pouvoir de faire la guerre et de punir ceux qui enfreignaient les lois."Mais dès le départ, l'État italien naissant ne semble pas capable d'atteindre cet idéal en Sicile, laissant la place à d'autres types d'organisations. Les gouvernants ne parviennent d'ailleurs pas à cerner convenablement le phénomène mafieux. Plus grave, ils ne dédaignent pas de s'en servir comme un "instrument de gouvernement local", y compris la gauche au pouvoir à partir de 1876.
Au départ, Cosa Nostra s'intéresse à la richesse générée par les citronniers de la Conque d'or (Conca d'oro), ce riche terroir agricole qui entoure Palerme, défiguré par l'urbanisation lors du "sac de Palerme", permis par l'organisation dans les années 1960. Les chefs mafieux font d'ailleurs pression sur les propriétaires des grands domaines (les latifondio) pour obtenir les places de régisseurs. Ce n'est donc pas de la misère qu'est née la mafia, mais plutôt de la volonté de captation des richesses. Par le racket de protection notamment.
Cosa Nostra s'enracine donc durablement en Sicile, essaime aux Etats-Unis avec l'émigration au début du XXème siècle. Les choses changent avec le fascisme.
En 1925, Mussolini nomme Cesare Mori préfet de Sicile. Celui-ci a pourtant réprimé les chemises noires alors qu'il était en poste à Bologne, mais se fond remarquablement dans les pratiques du régime. Son action, basée sur des coups de main spectaculaires comme le siège de Gangi en 1926, sur des discours fermes et violents, allait marquer un certain déclin de la Mafia et lui valoir le surnom de "préfet de fer".
La guerre allait modifier cette situation et le débarquement américain de 1943 devait redonner un rôle important à la Mafia. Il semble que les liens existant entre la Cosa Nostra américaine et sa "grande soeur" aient de nouveau facilité l'utilisation de la Mafia comme "instrument de gouvernement local", contribuant à la remettre en selle. Cette situation allait perdurer dans l'après-guerre avec l'arrivée au pouvoir de la Démocratie chrétienne (la D.C. à la tête de tous les gouvernements de l'après-guerre jusque dans les années 1980) dont les chefs locaux (Gioia, Ciancimino et Lima) se sont avérés de fidèles serviteurs de la Mafia.
Avec ses "voisins", la Mafia s'assure des bonnes relations, par exemple en aidant la 'Ndrangetha calabraise à se structurer en "Familles" après-guerre ou en adoubant Cutolo à la tête de la Camorra napolitaine en 1970 pour mieux s'assurer l'approvisionnement en drogue, marché très juteux en grande partie contrôlé par la Mafia. Les relations avec la Sacra Corona Unita des Pouilles, à cause de la distance géographique, semblent moins importantes. On mesure l'implantation de ces différents groupes par le paiement du pizzo, cette rémunération demandée aux entrepreneurs contre une "protection" qui s'apparente à du racket. Le patronat italien a dressé l'an dernier une carte d'Italie du pizzo.
L'arrestation régulière de ses chefs (comme celle de Bernardo Provenzano dit "le Tracteur" en 2006) ne semble que décapiter l'organisation qui aurait, selon le mot de Jean-François Gayraud, davantage besoin d'être déracinée.
La chanson d'Akhenaton évoque d'une certaine manière l'impossible réinsertion des mafieux dans la vie normale, qu'ils tentent de se faire oublier où qu'ils collaborent avec la justice. A partir du moment où le mafieux est initié dans cette société secrète, il ne doit plus en sortir, sinon mort. C'est au rite d'initiation que fait référence la chanson "Le jour où mon sang coula sur un fil je fus perdu". L'apprenti-mafieux se fait en effet piquer le doigt avec une épingle, son sang coulant sur une image sainte qui est ensuite brûlée. Il fait dorénavant partie d'une cosca. C'est le terme sicilien désignant un clan. La cosca (pl. cosche) est donc une "Famille" qui forme avec d'autres cosche la Mafia. Celle de Corleone, dont parle Akhenaton, s'est imposée très brutalement au sein de Cosa Nostra à partir des années 1970, exerçant, sous la direction de Luciano Leggio puis de Toto Riina, une véritable dictature conduisant à la "seconde guerre mafieuse" du début des années 1980.
Ce blog, tenu par des professeurs de Lycée et de Collège, a pour objectif de vous faire découvrir les programmes d'histoire et de géographie par la musique en proposant de courtes notices sur des chansons et morceaux dignes d'intérêt.