lundi 25 janvier 2010

199. Les Ambassadeurs Internationaux: "Mandjou" (1978)

L'ascension politique d'Ahmed Sékou Touré reste tout à fait exceptionnelle. Simple receveur à la poste de Conakry en 1946, il fonde alors le Syndicat des Postes et des Télécommunications, le premier syndicat de Guinée. Cinq ans après, il dirige le Parti Démocratique Guinéen (PDG). Dix ans plus tard, devenu maire de Conakry, il représente la Guinée à l'Assemblée nationale française.
En l'absence de moyens de communication modernes, Touré perçoit très tôt tout le parti qu'il peut tirer de la chanson. Des airs louant les mérites du PDG sont susceptibles de convaincre une population en grande partie analphabète.

Lors d'un sommet des non-alignés, Fidel Castro accueille trois dirigeants africains: Sékou Touré, Agostinho Neto (Angola) et Luis Cabral (Guinée-Bissau) en 1979.
En 1956, la mise en place de la loi cadre-Defferre irrite le leader guinéen qui regrette la suppression des cadres fédéraux de l'AOF et de l'AEF au profit de territoires dotés de capitales. Tout comme Senghor, et à la différence de l'Ivoirien Houphoët-Boigny, il redoute une "balkanisation" de l'Afrique.

De retour au pouvoir en 1958, de Gaulle propose la création d'une Communauté française, au sein de laquelle la France conserverait des prérogatives dans des "domaines réservés" (affaires étrangères notamment). Aussi, du 20 au 29 août, le général de Gaulle effectue une tournée dans plusieurs capitales africaines afin de présenter aux populations son projet. Tous les observateurs sont frappés par les ambigüités du discours. Alors que les Africains attendent le mot indépendance, de Gaulle parle de Communauté. Certes, celle-ci n'est plus la colonisation, mais elle n'est pas non plus le Commonwealth (puisqu'il suppose des États autonomes ou indépendants).
Une question cruciale se pose du côté des Africains, faut-il prendre l'autonomie avec la perspective d'une indépendance à moyen terme ou faut-il demander l'indépendance tout de suite? Les populations de l'Union française sont donc appelées à se prononcer lors du référendum instituant la Communauté française. La plupart des dirigeants africains appellent à voter oui. Sékou Touré, souhaitant accélérer le processus de décolonisation, réclame au contraire que le mot "indépendance" figure dans le texte.
De Gaulle et Sékou Touré lors de la visite du président français à Conakry, le 25 août 1958.
Le 25 août 1958, lors d'un discours tenu dans la mairie de Conakry, Sékou Touré lance à de Gaulle: "Nous préférons la liberté dans la pauvreté à l'opulence dans l'esclavage". Le mois suivant, alors que le "oui" l'emporte partout, la Guinée est le seul pays à rejeter massivement la proposition de de Gaulle lors du référendum. Ce choix entraîne la rupture immédiate avec la métropole.


La Guinée accède à l'indépendance le 2 octobre 1958, tandis que Sékou Touré s'autodésigne premier président du pays. Le général de Gaulle, outré par le ton du discours du 25 août, suspend immédiatement toute aide à la Guinée. L'administration guinéenne, privée de tous les techniciens et fonctionnaires français, doit repartir de zéro. Pire, certaines infrastructures sont démantelées par les anciens colonisateurs. Paris tentera également d’empêcher l’admission du nouvel État aux Nations unies. Le divorce est définitivement consommé entre l'ancienne colonie et sa métropole. L'orientation socialiste du régime guinéen creuse encore le fossé et conduit à la rupture des relations diplomatiques entre les deux pays de 1965 à 1975.
Les conséquences du non guinéen sont capitales. En effet, relativement esseulée, la Guinée se rapproche des pays de l'Est et du Ghana. Elle devient une base d'action soviétique en Afrique. Avec le Ghana , elle devient le chef de file des pays africains "progressistes". En novembre 1958, NKrumah et Touré tentent de bâtir l'Union Ghana-Guinée, une union susceptible d'entraîner un bouleversement des frontières coloniales et des zones d'influences européennes. Le pays devient aussi un foyer d'accueil pour les révolutionnaires africains (notamment les membres de l'UPC camerounais) en lutte contre la domination coloniale. Mais si Touré s'impose en tant que modèle pour les plus radicaux, il fait figure d'épouvantail pour les autres dirigeants de la Communauté française.
Sékou Touré représenté en Saint-Georges terrassant le dragon du colonialisme.

Rapidement le nouveau chef de l'Etat guinéen instaure un régime très dur. Il adopte le marxisme-léninisme et refuse toute forme de coopération avec la France, fustigeant "l'impérialisme, le colonialisme et le néo-colonialisme".

Le président Sékou Touré à la tribune de l'ONU en 1962.

* Une dictature sanguinaire.
 Le régime ne cesse de se durcir. La répression est encore aggravée par les nombreuses tentatives de coups d'états dont la Guinée fait l'objet (17 au total durant toute la période Touré). Désormais, le dictateur vit dans la hantise du putsch et sombre dans la paranoïa, qui le conduit à massacrer tous ces rivaux potentiels. Il n'hésite pas à faire fusiller la quasi-totalité de son gouvernement en 1964. Le fondateur des Ballets africains et ex-ministre de l'intérieur, Keita Fodéba, est jeté en prison en 1969, où il décède (sans doute des suites de tortures).
Le coup d'Etat manqué d'exilés guinéens du 22 novembre 1970, appuyé par les Portugais, plonge le pays dans la terreur, marquée par des arrestations et exécutions en série. Des milliers d'opposants meurent sous la torture dans les sinistres geôles du camp Boiro. Pour échapper à un sort comparable, des centaines de milliers de Guinéens fuient alors le pays.

Billet à l'effigie de Sékou Touré.

En 1984, à la mort de Touré, le colonel Lansana Conté s'empare du pouvoir, utilisant à nouveau la violence et la contrainte. Ce dernier rompt avec la politique culturelle de Touré, abandonnant à leur sort les orchestres nationaux choyés par le régime de Touré.

La musique comme arme de propagande.
Pour contrer l'influence culturelle de l'ancienne métropole, Touré a mis en place une politique culturelle inédite et originale sur le thème de l’authenticité. L’objectif est de faire naître une musique populaire guinéenne en modernisant les traditions. Le dirigeant y voit le moyen de contribuer à forger chez ses compatriotes ce sentiment national auquel il attache tant importance. Selon lui,"la culture est une arme de domination plus efficace que le fusil".
Le mécénat d'Etat conduit à la création d'orchestres dans les différents régions du pays. Ces formations s'affrontent lors de compétitions et les meilleures d'entre elles sont même "nationalisées", bénéficiant du soutien financier de l'Etat. Parmi les plus célèbres orchestres, citons Keletigui et ses Tambourinis, Balla et ses Baladins, les Amazones de Guinée ou encore le Bembeya Jazz national. Les créations musicales de ces formations sont enregistrées au studio de la Révolution et publiées par la firme d'Etat Syliphone, que symbolise un éléphant, l'emblème du parti présidentiel. Le label permet ainsi la commercialisation de la musique mandingue rénovée dans tout le continent.
 
Pochette du disque Mandjou par les Amabassadeurs Internationaux.

Le mécénat artistique de Sékou Touré attire auprès de lui de nombreux artistes, à l'instar de Miriam Makéba (1) ou du Malien Salif Keita. (2) Membre d'une caste supérieure et albinos, ce dernier doit batailler ferme pour imposer son désir de chanter. Sa voix d'exception, très haut perché, lui permet de surmonter ce double handicap. Il accède à la notoriété au sein du Rail Band Bamako, qu'il quitte en 1973 pour les Ambassadeurs du Motel. Sa rencontre avec le compositeur-guitariste guinéen Kanté Manfila permet à Keita de travailler au "folklore modernisé" que Sékou Touré promeut.

En 1978, les Ambassadeurs (devenus Internationaux) s'installent à Abidjan, la nouvelle capitale culturelle de l'Afrique de l'Ouest, qui éclipse progressivement Conakry. Ils y enregistrent l'album Mandjou. Dans le titre éponyme, le chanteur à la voix d'or loue Sékou Touré et les membres de sa famille. L'écho du morceau est énorme dans toute l'Afrique de l'Ouest.
Le dictateur guinéen apprécie énormément le morceau qui s'inscrit parfaitement dans son idée de folklore modernisé et attribue au chanteur la médaille d'officier de l'ordre national guinéen. La chanson, sublime, a du être diversement apprécié en Guinée. Les suppliciés du camp Boiro ne partageant certainement pas la considération de Keita pour Mandjou...

La pochette arrière de l'album Mandjou sur laquelle Salif Keita arbore fièrement sa médaille. Le chanteur y est qualifié de "Domingo de la chanson malienne" en référence à son homonyme, joueur de foot malien qui fit les beaux jours de Saint-Étienne et de Marseille.


Spéciale dédicace à Greg...
 
Notes:
1. La chanteuse quitte les Etats-Unis où elle est devenue persona non grata depuis son mariage avec Stockely Carmichael, le héraut du Black Power.
2. Keita doit batailler ferme afin d'imposer son désir de chanter. En effet, dans la société de castes malienne, les Keita, représentent les nobles auxquels il est interdit de chanter. Ce rôle est devenu celui des djelis (ou griots). Ces derniers forment une caste à part dont le statut se transmet de génération en génération. Détenteurs de la mémoire et de la tradition, ils restent les garants du bon fonctionnement de la communauté. Dans cette société orale, ils font ainsi office de conservateurs, en tant qu'unique dépositaire de la généalogie des familles nobles. C'est lui qui mémorise et transmet l'histoire, lui qui chante les louanges et les hauts faits de familles princières, auxquelles il sert aussi de porte-parole. Dans ces conditions, il est inadmissible pour un noble de s'abaisser à chanter. Ainsi, le père de Salif Keita n'accepte pas la vocation musicale de son fils et le renie.
Keita est également ostracisé en tant qu'albinos.
 

Les Ambassadeurs Internationaux: "Mandjou" (1978).

Mandjou, ne pleure pas
fils d'Alifa Touré ne pleure pas
Mandjou, ne pleure pas
fils d'Aminata, Fadiga, ne pleure pas
Mandjou, ne pleure pas
Père d'Andrée Madu, ne pleure pas
mon espoir est avec toi
le temps de pleurer n'est pas encore venu, Mandjou
qu'Allah récompense Mandjou avec de l'or
Mandjou, ne pleure pas
fils d'Alifa Touré ne pleure pas
Mandjou, ne pleure pas
père de la petite Aminata ne pleure pas
tout le monde croit en toi
le temps de pleurer n'est pas encore venu, Mandjou
qu'Allah récompense Mandjou avec de l'or
Mandjou, la paternité est une source de fierté
le puissant Allah l'a fait pour toi
Mandjou, avoir des enfants est une source de fierté
le puissant Allah l'a fait pour toi
Mandjou, la vérité est source de fierté
Mandjou, ne pleure pas
fils d'Alifa Touré, ne pleure pas
Mandjou, ne pleure pas
Père d'Andrée Madu, ne pleure pas
la mort d'une jeune personne n'est pas bien mon père
le temps de pleurer n'est pas encore venu Mandjou
qu'Allah récompense Mandjou avec de l'or.

Sources:
- Franck Tenaille: "Le swing du caméléon", Actes Sud, 2000.
- Jeune Afrique n°2558, du 17 au 23 janvier 2010.
- L'Histoire n°350, février 2010.
- Florent Mazzoleni: "Salif Keita".
- Sur Samarra: "L'épopée mandingue en musique".
- «"Mandjou" , le titre qui a révélé Salif Keïta" (Pan-African-Music)

Liens:
* Sur L'histgeobox:
- morceau en hommage à l'ancêtre de Sékou Touré, L'Almamy Samori Touré.
- Titre de Tiken Jah Fakoly consacré aux dictateurs africains qui s'accrochent coûte que coûte au pouvoir.

jeudi 14 janvier 2010

198. Les fils de joie: "Tonton macoute".

Un violent séisme vient de ravager Haïti, dévastant ce pays très pauvre et provoquant de très nombreuses victimes. Les conséquences de cette catastrophe naturelle sont aggravées par la déliquescence de l'Etat.
L'île fut en effet particulièrement éprouvée par l'histoire; elle a subi tour à tour la colonisation, l'esclavage, mais aussi de nombreuses dictatures. Cet vieille chanson des filles de joie évoque une des pages les plus sombres de l'île, la dictature de François Duvalier et ses redoutables tontons macoute.


A l'origine, Tonton Macoute est un personnage folklorique, généralement un vieillard portant en bandoulières un "macoute", et qui inspire une certaine crainte chez les enfants à cause de sa tenue austère. Or, sous la dictature de Papa Doc (Duvallier père), ce terme désigne les membres du groupe paramilitaire et de police parallèle appelés les Volontaires de la Sécurité Nationale (VSN). Cette milice, créée à la suite d'une attaque contre le président François Duvalier (le 29 juillet 1958), sert de garde prétorienne au dictateur. Très vite, elle sème la terreur et la mort dans son sillage, inspirant la plus grande crainte chez les Haïtiens.
Ils ne sont, malheureusement, qu'une des nombreuses plaies qui affectèrent ce territoire, comme nous allons le voir maintenant.


François Duvalier en 1963.

Christophe Colomb débarque en 1492 dans le nord-ouest d'Haïti ("hautes terres" en arawak), entraînant, en un siècle à peine, la disparition de la population indienne (maladies, exploitation dans le cadre du travail forcé).
En 1697, la France récupère par le traité de Ryswick la partie occidentale de l'île d'Hispaniola, tandis que les Espagnols conservent l'autre partie (future République dominicaine). Les colons français développent les cultures industrielles comme le café, le coton, le sucre. Les esclaves venus d'Afrique permettent au système de se développer, jusqu'à la grande révolte menée par Toussaint Louverture en 1791. Dessalines, qui triomphe du corps expéditionnaire envoyé par le premier Consul Bonaparte, proclame l'indépendance d'Haïti le 1er janvier 1804. La portée de cet événement est immense puisqu'il s'agit de la première guerre d'émancipation coloniale qui voit triompher pour la première fois des esclaves, donnant naissance à la première République noire.

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Toussaint Louverture.

Les puissances coloniales européennes, mais aussi les Etats-Unis, craignent une contagion de l'abolition de l'esclavage et engagent le blocus de l'île qui peine à se développer. Les généraux de l'indépendance qui se succèdent à la tête d'Haïti se montrent incapables de créer un Etat moderne et de forger une nation.
Déjà, l'île est ravagée par de violents tremblements de terre. Par exemple, en 1842, un séisme détruit la capitale du roi Christophe, Cap-Haïtien.

La fin du XIX° siècle et le début du XX° sont marqués par des guerres civiles à répétition et la misère économique. Au nom de la doctrine Monroe, les Américains interviennent en 1915 et tentent de renforcer les institutions et les équipement tout en développant les cultures industrielles au détriment des cultures vivrières traditionnelles. En 1934, les Etats-Unis se retirent et le pays plonge de nouveau dans le chaos, jusqu'à l'arrivée au pouvoir de François Duvalier.

Papa Doc et Bay Doc.


En 1957, ce dernier, familièrement appelé «Papa Doc», est élu président. Très vite, il installe son pouvoir autoritaire dans l'île. Dès 1964, il se proclame président à vie, s'arroge tous les pouvoirs et impose le parti unique. Le dictateur utilise tous les moyens pour se maintenir en place et réprime sans hésiter toute tentative de contestation. Il s'appuie ainsi sur une milice redoutable: les Tontons Macoute.



A la mort de François, en 1971, son propre fils de 19 ans, Jean- Claude Duvalier, surnommé «Baby Doc», accède au pouvoir et instaure à son tour un régime de terreur en Haïti. Le monopartisme est de mise et seul le CONAJEC (Conseil National d' Action Jean-Claudiste!!!) a le droit de citer. Tous les rouages de l’État restent entre les mains de "Baby Doc", qui tente d'assurer le décollage économique du pays. Pour ce faire, il tente d'attirer les investissements nord-américain, s'appuie sur le tourisme et fait appel à l'aide internationale, qui atterrit en grande partie dans ses poches. Au cours de son "règne", l'endettement file et lorsqu'il est enfin chassé du pouvoir en 1986, Haïti se trouve en situation de faillite.

Fin 1985, la situation sociale devient si critique que la population se rebelle et multiplie les manifestations. Au mois de janvier 1986, les protestataires s'en prennent aux symboles du pouvoir, les tontons macoutes, mais aussi le palais de justice des Gonaïves. La situation échappe en tout cas totalement au dictateur qui est contraint de déclarer l'état de siège le 31 janvier. Toutes ces journées d'émeutes sont émaillées de nombreux morts (opposants et tontons macoutes). Finalement, le 7 février 1986, il parvient à trouver refuge en France avec le soutien logistique des États-Unis.

L'annonce du départ de Baby Doc provoque l'euphorie, pourtant les malheureux Haïtiens n'en ont pas fini avec l'instabilité politique et les difficultés économiques et sociales. C'est le général Henri Namphy qui s'installe alors au pouvoir en tant que président du Conseil national du gouvernement, composé principalement de militaires. Au cours des trois années suivantes, le nouveau régime reste particulièrement instable, sans cesse sous la menace de coups d'états.
Le 7 avril 1990, l'élection de Jean-Bertrand Aristide suscite un immense espoir. Ce prêtre défroqué promet le changement et l'instauration de la démocratie en Haïti. Mais, en septembre 1991, le coup d'état du général Cédras le renverse. Aristide parvient néanmoins à convaincre la communauté internationale d'instaurer un blocus économique sur l'île afin de venir à bout du régime militaire. En fait, ce sont surtout les rares structures économiques encore en place qui en pâtissent.

C'est l'administration du président américain Clinton qui ramène au pouvoir Aristide au prix d'une seconde intervention américaine. Si René Préval succède à Aristide à la présidence, c'est pourtant ce dernier qui conserve la réalité du pouvoir. Son administration chaotique lui aliène la majeure partie de ses soutiens populaires. Pour paralyser l'opposition, l'ancien prêtre utilise à son tour les bandes armées, les redoutables "chimères", qui réactivent le terrible souvenir des tontons macoute. L'économie de l'île est gangrénée par une corruption généralisée. Les gangs urbains contrôlent les trafics d'armes et de drogues et se lancent dans l'industrie du kidnapping qui fragilise encore une société durement éprouvée par la misère et l'oppression. Finalement, Aristide est contraint de s'exiler en Afrique du sud en 2004, laissant Haïti dans une situation anarchique.

Depuis, 10 000 soldats et policiers de l'ONU aident à reconstruire le pays et essaient d'organiser le jeu politique sur de nouvelles bases. La criminalité a reculé et lors des élections du 7 février 2006, René Préval s'est fait réélire grâce aux voix des populations les plus humbles.
Il tente tant bien que mal de sortir son pays de l'ornière. Il a fort à faire puisque l'Etat haïtien se trouve dans un état lamentable, sous perfusion d'une aide internationale parfois brouillonne.

L'exode rural est venu gonfler la population de Port-au-Prince. Les nouveaux arrivants s'installent où ils le peuvent, dans des bidonvilles particulièrement soumis aux risques naturels. L'absence de plan d'urbanisme et de normes antisismiques aggravent bien sûr les conséquences du terrible séisme d'avant-hier. C'est l'extrême pauvreté de la population (72% de la population vit avec moins de 2 dollars par jour) et la désorganisation de l’État qui transforment cette catastrophe naturelle en catastrophe humanitaire.


Tonton Macoute (Olivier Blin)

Je suis un tonton Macoute
Tonton Macoute.
Je garde mon président, j'assure sa protection
rapprochée. Je suis son préféré !
Avec les filles pas de problème
Je torture je torture !

Avec mon couteau de commando
S'il y a des dissidents je torture !
Il y a des années que ça dure
Avec mon couteau who ho
C'est facile, facile, facile, mmmmh mama....

Hier soir, à l'Eden Bar
On est allé se défouler
Il y avait, deux trouillards
Moi je les ai rattrapés je les ai vitriolés !

Avec mon couteau de commando
S'il y'a des dissidents je torture !
Il y a des années que ça dure
Avec mon couteau who hoo
C'est ... facile ... facile ... facile, facile, facile, mmmh mama

Whoo avec mon couteau de commando
S'il y a des dissidents je torture !
Il y a des années que ça dure
Avec mon couteau whooo
C'est ... facile ... facile ... facile, facile, facile, mmmh mama
Whooo hooo

J'aime bien noyer les reporters
Qui prennent trop de photos
Mais mon sport favori c'est
Couper les têtes à grands coups de machette !

Avec mon couteau de commando
S'il ya des dissidents je torture !
Il y a des années que ça dure
Avec mon couteau whooo

C'est ... facile ... facile ... facile, facile, facile

Sources:
- Libération du jeudi 14 janvier 2010.
- Perspective Usherbrooke.

Liens:

- Les fils de joie.
- Glossaire sur Haïti.
- Terrifiante série de photos de Steven Bollman sur les tontons macoute.

jeudi 7 janvier 2010

197. Léo Ferré: Monsieur tout blanc".


En 1949, Léo Ferré, jeune chanteur de cabaret écrit Monsieur Tout-Blanc, une chanson interdite alors par le Comité d’écoute de la radiodiffusion française, car Ferré y brocarde en effet le silence du pape Pie XII au cours de la seconde guerre mondiale. Alors qu'il prend connaissance de la persécutions des juifs, celui n'intervient pas publiquement.Monsieur Tout-blanc
L'oiseau blessé que chaque jour, vous consommez
Etait d'une race maudite
En ce temps là, dites
Vous vous taisiez...



61 ans après la sortie de cette chanson, l'attitude du pape reste toujours controversée. Pour y voir plus clair, il faut revenir en arrière.

Le 20 juillet 1933, alors que les nazis sont depuis peu au pouvoir, Pie XI, prédécesseur de Pie XII, signe un concordat avec l'Allemagne hitlérienne par l'intermédiaire de Frantz Von Papen et d'Eugenio Pacelli, secrétaire d'Etat de l'Eglise (et futur Pie XII). Mais, les violations du concordat, la dissolution des mouvements de jeunesse catholique, l'embrigadement de la jeunesse dans les Jeunesses hitlériennes aboutissent bientôt à la rupture entre le le IIIe Reich et le Saint-Siège. Longtemps, les autorités catholiques espérèrent pouvoir freiner l'anticléricalisme du pouvoir, en vain.

C'est pourquoi, en mars 1937, Pie XI publie l'encyclique Mit brennender Sorge (« C'est avec une brûlante inquiétude »). Il y condamne la mystique païenne sur laquelle repose le nazisme, ainsi que les thèses racistes contraires au discours chrétien ("Celui qui sépare la race, la nation, le gouvernement (…) de toutes les valeurs humaines de référence et en fait des normes supérieures, plus hautes que les valeurs religieuses et les révèrent avec idolâtrie, pervertit et détruit l’ordre recommandé par Dieu (…)").En effet, depuis 1935, les lois de Nuremberg institutionnalisent l'antisémitisme, thème central du nazisme hitlérien.Le décret-loi du 17 novembre 1938 complète cette législation et énumère les mesures pour la « défense de la race », établissant des critères pour identifier les Juifs, sur lesquels pèsent une série d'interdictions multipliées au fil des mois.


Mit brennender Sorge est suivie de peu par l'encyclique Divini redemptoris qui dénonce le communisme. Elle marque la volonté du pape de s'impliquer dans le domaine politique face à la dangereuse séduction qu'exercent alors les deux totalitarismes. Cette prise de position semble avoir eu un impact assez limité, puisque la population de l'Autriche, majoritairement catholique, vote son rattachement au Reich en 1938. Au fond, de nombreux catholiques allemands (comme le reste de la population d'ailleurs) semblent se rallier sans difficultés au régime nazi.
Au Vatican, certains ne cachaient pas non plus une certaine sympathie à l'égard des régimes autoritaires de tendance clérico-fasciste à l'instar de l'Espagne franquiste et espérait pouvoir « catholiciser » le fascisme.
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Panneau consacré 0 Pie XII au mémorial de Yad Vashem à Jérusalem.

* Election de Pie XII au pontificat.


Pie XI meurt le 10 février 1939. Très rapidement son successeur, le cardinal Eugenio Pacelli, est élu pape sous le nom de Pie XII. Connu à Rome pour sa prudence, il connaît parfaitement les arcanes diplomatiques européennes, après sa longue nonciature en Allemagne. Avant d'accéder au pontificat, il intervient à plusieurs reprises auprès de Pie XI pour éviter qu'il ne rompe avec l'Allemagne.


Ses premières actions en tant que pape, confirment cette tendance puisqu'il demande à l'Osservatore Romano (le quotidien édité par le service officiel d'information du Vatican) d'éviter toute polémique à l'égard de l'Allemagne. Après les critiques ouvertes de la fin du pontificat de son prédécesseur, il engage une politique de détente à l'égard du IIIème Reich, en concertation avec les cardinaux allemands.

Alors que les tensions internationales laissent augurer un conflit, le pape déploie toute son énergie afin de préserver la paix. Une fois les hostilités ouvertes, en septembre 1939, Pie XII est informé des méthodes de guerre et d'occupation nazies (massacres d'intellectuels en Pologne, traitements réservés aux Juifs). Le Saint-Siège se contente alors de dénonciations en termes très généraux. Le pape se trouve alors face à un dilemme: faut-il dénoncer publiquement de tels crimes ?[pie_XII.jpg]


Il répond par la négative. Plusieurs éléments permettent de comprendre le mutisme du saint-siège au cours de la guerre.
* "Rendre à César ce qui appartient à César et à l'Eglise ce qui appartient à l'Eglise".

Pour Pie XII, cela ne fait aucun doute, il doit rester impartial face aux conflits temporels qui opposent les puissances européennes. De la sorte il espère préserver son rôle de médiateur potentiel entre les belligérants. Dans ces conditions, il considère qu'il doit rester neutre. Il évite ainsi également de se couper des catholiques des pays belligérants qui combattent pour leurs patries respectives.

Au fond le pape semble avant tout envisager cette guerre comme une lutte pour l'hégémonie européenne, sans voir qu'il s'agit d'un affrontement à mort entre idéologies opposées (démocratie libérale contre les différentes formes de fascisme).

* La crainte d'entraîner des persécutions contre les catholiques allemands.
Le pape était particulièrement préoccupé par le sort des catholiques allemands.
Ainsi, il écrit aux évêques allemands au cours du conflit:

« S'il est un pays, en ces temps de guerre, que nous avons souhaité traiter avec une considération particulière, c'est bien l'Allemagne, et ce parce que nous voulons épargner aux catholiques allemands toute aggravation inévitable d'une situation déjà si douloureuse. »Lettre du 1er mars 1942 à l'archevêque de Fribourg, Mgr Gröber

Alors que « la persécution religieuse » se poursuit au sein du IIIème Reich (les services de sécurité du Reich classaient dans la rubrique « Gegner » (adversaires) les activités pastorales et de formation de l’Église allemande, les autorités ecclésiastiques réaffirment l’esprit de loyauté à l’égard de l’État. Pie XII entend « laisser aux Pasteurs travaillant sur place » le soin d'évaluer la possibilité et l'opportunité de parler ou non en public. Les évêques allemands ont choisi de se taire.


Certes, à l'été 1941, de nombreux évêques dénoncent l'assassinat systématique des handicapés et des malades mentaux. Ces critiques aboutissent à l'interruption de l'opération. Mais, en revanche, ils gardent le silence face aux mesures visant les Juifs (tout comme ils s'étaient tus au cours des années 1930, alors que les premières mesures antijuives rentraient en application).

Lorsque les persécutions s'accentuent pour aboutir à l'extermination systématique, le silence du pape se poursuit. Ses défenseurs avancent qu'il manquait d'informations. Or, à l'évidence les faits étaient connus de Pie XII.

Le 5 février 1942, Mgr Berning, l'évêque d'Osnabrück écrit : « Le plan d'élimination totale des Juifs se poursuit à l'évidence. [...] Que peut-il arriver ? Les évêques peuvent-ils lancer depuis leur chaire une protestation publique ? » (le 20 janvier 1942, la conférence de Wannsee avait officiellement décidé d'appliquer la « Solution finale »).D'autres voix s'élèvent aussi au sein du clergé allemand réclamant une dénonciation publique collective. Ainsi, le 27 février 1943, Margarete Sommer, responsable de l'« Oeuvre de secours de la Curie berlinoise », particulièrement engagée dans l'aide aux Juifs persécutés, invite les évêques à « parler du haut de leur chaire de manière aussi claire et explicite que possible ». En vain.

Dans l'ensemble, le clergé allemand rechigne à toute prise de position ferme contre le nazisme, sa marge de manœuvre étant, il est vrai, limitée. Ainsi le cardinal Faulhaber, archevêque de Munich, rappelait lors de la conférence de l'épiscopat bavarois du 30-31 mars 1943 :
« La tension et le dissentiment se diffusent également dans les milieux catholiques et s'expriment à travers des questions dramatiques telles que celles-ci : pourquoi les évêques ne s'engagent-ils pas ? Pourquoi ne parlent-ils pas ? Et l'on répond : rien ne pourrait rendre un meilleur service aux plus grands adversaires de l'Église que de recourir maintenant à l'artillerie lourde. A un moment où nous nous trouvons en difficulté, cela permettrait encore une fois de remettre sur le tapis la vieille histoire du coup de poignard dans le dos [selon laquelle les socialistes et les révolutionnaires allemands auraient contraint le pays à l'armistice en 1918]. Mon impression, c'est que c'est justement cela qu'on attend. »

L'archevêque redoute de voir les catholiques accusés de constituer une cinquième colonne au sein du IIIème Reich, ce qui aggraverait les persécutions antichrétiennes et mettrait en péril le catholicisme allemand. Il s'avère que Pie XII partage totalement cette analyse. Par ailleurs, un autre élément doit être pris en compte pour tenter de comprendre le mutisme du souverain pontife: son anticommunisme viscéral.
Spiegel - Der SPIEGEL 43/1997 -- Augstein über Papst Pius XII. und den Holocaust



* Le communisme, « grand ennemi de la chrétienté »

Avec le déclenchement de l'opération Barbarossa (attaque du Reich contre l'URSS), le 22 juin 1941, le pape redoute d'affaiblir l'Allemagne dans la lutte à mort qui l'oppose, à l'est, au communisme, « grand ennemi de la chrétienté et de la civilisation chrétienne ». Le démantèlement de l'Eglise orthodoxe en URSS, les massacres de prêtres au cours de la guerre civile espagnole (qu'il attribue à la haine antichrétienne des communistes), sans parler du pacte germano-soviétique qui aboutit à l'anéantissement de la Pologne catholique, confortent un peu plus encore le pape dans ses convictions.

La guerre d'anéantissement à l'est lui laisse espérer une usure réciproque des deux totalitarismes. Mgr Tardini, proche collaborateur de Pie XII, écrit ainsi au représentant personnel de Roosevelt auprès du Vatican, en septembre 1941, que l'idée était « [que] le communisme sorte défait et anéanti de la guerre qui a lieu actuellement en Russie, et que le nazisme en sorte affaibli et... à vaincre ».

Pie XII et ses collaborateurs redoutent plus que tout une victoire écrasante de Staline et
souhait,ent donc que soit conclue une paix séparée qui permettrait à I'Europe occidentale de récupérer une Allemagne vaincue et libérée du nazisme tout en bloquant l'avancée soviétique vers l'Europe centrale. Dans cette logique, il fallait éviter de s'aliéner les catholiques allemands et donc maintenir des relations diplomatiques avec l'Allemagne nazie.


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Pie XII en 1945.

Alors même qu'une rafle de plus de mille Juifs romains se déroulent à Rome (16 octobre 1943), le pape ne sort pas de sa réserve. Confidentiellement, le cardinal Maglione se contente de faire savoir à l'ambassadeur allemand que le Saint-Siège ne « voudrait pas être contraint d'exprimer sa désapprobation » si la rafle devait se poursuivre.
Elle est effectivement suspendue, mais de nombreux individus ont été déportés et il apparaît bien ici que le Vatican souhaitait en premier lieu éviter une rupture avec l'Allemagne.

L'ambassadeur allemand auprès du Saint-Siège écrit d'ailleurs à son ministre des affaires étrangères:
« Le pape, bien que pressé, dit-on, de divers côtés, ne s'est laissé amener à élever aucune protestation contre la déportation des Juifs de Rome. Bien qu'il doivent prévoir que son attitude sera retenue contre lui par nos adversaires et par les milieux protestants des pays anglo-saxons à des fins de propagande, il a aussi tout fait, dans cette affaire épineuse, pour ne pas grever les relations avec le gouvernement allemand et les services allemands de Rome. »
Weizsäcker au Ministère des Affaires étrangères, 28/10/1943

* «Que son sang soit sur nous et sur nos enfants ! » Le vieil antijudaïsme chrétien, profondément enraciné chez nombre de croyants, constitue sans doute aussi une des clefs d'explication au mutisme pontifical.
G. Miccoli (voir source) précise:
"au début du XXe siècle, l'apparition et le succès d'un antisémitisme raciste, qui affirmait dans le même temps son caractère explicitement antichrétien et qui devint l'élément fondamental de l'idéologie nazie, créèrent un trouble. On s'efforça alors de distinguer un antisémitisme « acceptable », qui combattait les Juifs pour ce qu'ils faisaient de mal, d'un antisémitisme raciste et non chrétien, qui combattait les Juifs en tant que juifs.
Mais la distinction ainsi formulée sur le plan des principes et des intentions ne pouvait pas avoir une grande influence sur les mesures concrètes de discrimination et d'oppression. Le silence quasi total des hiérarchies catholiques durant les années 1930 découle également de là. Ce n'est pas un hasard si, en août 1943, le secrétariat d'État retenait encore que les lois antijuives du fascisme devaient être corrigées mais non abolies, parce que, « suivant les principes et la tradition de l’Église catholique », elles contenaient des « dispositions qui méritaient confirmation »."

Beaucoup de chrétiens considèrent alors toujours les Juifs comme le peuple déicide, ceux qui ont persécuté le Christ. G. Miccoli rappelle ainsi que "des ecclésiastiques et des évêques expliquaient encore les événements en cours, dans les années 1930 et au début des années 1940, en renvoyant au chapitre 27, verset 25, de l'Évangile de Matthieu : « Que son sang soit sur nous et sur nos enfants ! » (réponse du peuple juif à Pilate)."

Au fond, la "question juive" occupait une place tout à fait secondaire dans les préoccupations du Saint-Siège et dans le contentieux qui l'opposait au IIIe Reich. Ce qui ne veut pas dire d'ailleurs que tous les chrétiens étaient sur cette même ligne, loin s'en faut ( à titre individuel ou même au sein d'organisations officielles). Les tentatives pour organiser des secours (favoriser l'émigration vers le nouveau monde, cacher les juifs persécutés) ou venir en aides aux victimes existèrent au cours du conflit.
Mais comme on peut le lire dans la légende concernant Pie XII au mémorial de Yad Vashem, on peut lire: " Son silence et son absence de directives ont contraint le clergé en Europe à décider de façon indépendante de l'attitude à adopter face à la persécution des Juifs."




* Une controverse réactivée par Benoît XVI.

Comment expliquer que la controverse, très ancienne, autour des relations complexes entre Pie XII et l'Allemagne nazie, ressurgissent aujourd'hui?Le samedi 19 décembre 2009, Benoît XVI a proclamé "vénérable" Pie XII, dernière étape avant la béatification. Pour le Vatican, la décision de béatifier Pie XII repose sur "son témoignage de vie chrétienne" et non sur "la portée historique de tous ses choix opérationnels".


Néanmoins, plusieurs éléments attisent toujours la controverse:
-Le refus du Vatican d'ouvrir ses archives.
- Le fait que cette procédure interviennent à la suite d'un ensemble de décisions allant toutes dans le même sens: la levée de l'excommunication de Mgr Williamson, un évêque négationniste; l'excommunication d'une mère brésilienne après l'avortement de sa fillette de 9 ans; les propos antipréservatif lors de sa tournée en Afrique...
Si sur le fond, ces positions ne tranchent pas vraiment avec celles de ses prédécesseurs, elles confirment en tout cas que le Vatican est décidément en décalage avec son temps.


Pour terminer laissons la parole:
- à François Mauriac.
Dans sa préface au livre de Léon Poliakov Le Bréviaire de la Haine (1951), le grand écrivain catholique regrette: "Nous n'avons pas eu la consolation, d'entendre le successeur du Galiléen, Simon Pierre, condamner clairement, nettement et non par des allusions diplomatiques, la mise en croix de ces innombrables frères du Seigneur".


- à Osborne Francis d’Arcy, le représentant britannique auprès du Saint-Siège, qui soulignait en son temps combien "La politique de silence envers des crimes commis contre la conscience du Monde, implique nécessairement une renonciation à toute autorité morale et en conséquence entraîne une atrophie de l’influence du Vatican."

Sources:
- Giovanni Miccoli: "Pie XII, Hitler et les juifs", L'Histoire n°241, 03/2001.


Monsieur Tout-Blanc
Vous enseignez la charité
Bien ordonnée
Dans vos chateaux en Italie
Monsieur Tout-Blanc
La charité
C'est très gentil
Mais qu'est-ce que c'est ?
Expliquez-moi


Pendant c'temps-là moi j'vis à Aubervilliers
C'est un p'tit coin perdu au bout d'la misère
Où l'on a pas tell'ment d'questions à s'poser
Pour briffer faut bosser mon p'tit père

Monsieur Tout-Blanc
L'oiseau blessé que chaque jour
Vous consommez
Etait d'une race maudite
Monsieur Tout-Blanc
Entre nous dites
Rappelez-vous
Y a pas longtemps
Vous vous taisiez

Pendant c'temps-là moi j'vivai à Aubervilliers
Ca n'était pas l'époque à dir'des rosaires
y avait des tas d'questions qu'il fallait s'poser
Pour durer faut lutter mon p'tit père

Monsieur Tout-Blanc
Si vous partez un beau matin
Les pieds devant
Pour vos chateaux en paradis
Monsieur Tout-Blanc
Le paradis
C'est p't' êt'joli
Priez pour moi
Moi j'ai pas l'temps

Car je vivrais toujours à Aubervilliers
Avec deux bras noués autour d'ma misère
On n'aura plus tell'ment d'questions à s'poser
Dans la vie faut s'aimer mon p'tit père
Monsieur Tout-Blanc
Si j'enseignais la charité
Bien ordonnée
Dans mes chateaux d'Aubervilliers
Monsieur Tout-Blanc
Ca n'est pas vous
Qu'j'irai trouver
Pour m'indiquer
C'qu'il faut donner

Liens:
- Pie XII et les juifs.

- Entretien de G. Miccoli sur le site de La Croix: "ce qui fait question, c'est sa prise de parole publique" et aussi "le discernement fait aussi partie des vertus héroïques."

- "Pie XII et le IIIe Reich" sur le blog de l'histoire.